Les problèmes de la force de surface de l’US Navy

  • Dernière mise à jour le 11 mai 2008.

Le commandant de la force de surface de l’US Navy a effectué le 10 avril dernier une visite impromptue le long des quais de San Diego avec le représentant des officiers-mariniers, et aucun des 2 n’a été heureux de ce qu’ils ont vu.

Des marins ne saluaient pas. Leurs uniformes étaient sales. Les navires présentaient de la rouille et leurs quais et parkings n’étaient pas propres.

Ce qu’il a constaté a tellement énervé le vice-amiral D.C. Curtis, le commandant de la force de surface de l’US Navy [1], qu’il a envoyé un message spécial le lendemain ordonnant aux marins de “revenir aux bases” — avoir leur uniforme et la coupe de cheveux réglementaire, reprendre leur bâtiment en main, et généralement ressembler à des marins appartenant à “la plus grande marine du monde,” écrivait-il.

Le maître-principal Michael Schanche a envoyé de son côté un message à l’attention des officiers-mariniers de la marine de surface et leur demandant de remettre leurs équipages dans le droit chemin :

“Camarades de bord, j’ai toujours été incroyablement fier d’être le représentant des officiers mariniers de la la force de surface. Aujourd’hui cependant a été la première fois au cours de mon mandant où je dois avouer que j’ai été professionnellement embarrassé !”

Des marins ont seulement regardé passer le véhicule de l’amiral Curtis, parfaitement reconnaissable avec sa marque à 3 étoiles, écrit Schanche. Le seul marin qui a salué était assis sur une pile de palettes “et il ne s’est même pas levé. Inadmissible !”

Le 18 avril, l’amiral Curtis était devenu si insatisfait de l’état de la flotte de surface qu’il a publié un 3è message ordonnant une “pause stratégique,” exprimant son inquiétude à propos de la capacité des équipages à évaluer leur propre état.

“Des inspections récentes, formelles et informelles, indiquent que notre capacité à nous auto-évaluer a diminué, conduisant à une préparation réduite,” écrivait Curtis.

Deux des “évaluations formelles” qui sont devenues publiques peu après l’inspection de Curtis sont des rapports du Navy’s Board of Inspection and Survey concernant le destroyer Stout et le croiseur Chosin, qui étaient en si mauvais état qu’ils ne pouvaient utiliser leurs canons, lancer leurs missiles, utiliser leur plateforme hélcioptère ou utiliser leur système radar Aegis. Pour les responsables de la Navy, ces défaillances étaient causées par un manque d’entretien et de respect des procédures, pas par un manque d’argent ou un rythme opérationnel élevé.

Schanche a déclaré le 1er mai à Navy Times que, lorsque lui et Curtis avaient effectué une autre visite sur le front de mer quelques jours plus tard, ils avaient constaté une “amélioration de 100 %” sur leur premier passage. Mais des lecteurs de Navy Times ont indiqué qu’ils pensaient qu’il faudrait plus qu’un message de l’amiral et quelques jours pour corriger les choses.

Des marins ont du mal avec l’auto-évaluation parce qu’ils ne sont pas entraînés aussi complètement sur les systèmes embarqués qu’ils utilisent, a écrit “EMC2E” dans le forum de Navy Times :

“De nombreux autres programmes ont transformé le marin, par certains aspects, en un meilleur marin en temps que personne, mais ont écarté le marin de sa mission dans la vie. Il n’est plus le penseur astucieux et innovant qu’il a été par le passé. Il s’appuie sur ce que lui indique l’installation et non sur son expérience du système. Le personnel embarqué d’aujourd’hui est entouré de politiques, d’une mauvaise gestion du temps, de défaillances mécaniques et de matériels qui se dégradent. Rien de cela n’est nouveau. Il me semble que c’est la même histoire et que personne n’écoute.”

“BLD” rend aussi responsable la formation, soulignant la différence entre la façon dont sont formés les officiers de la force de surface et leurs homologues des sous-marins :

“Les sous-mariniers connaissent beaucoup mieux la façon dont fonctionne leur matériel et comment le réparer, et c’est parce qu’ils dépensent des sommes monstrueuses dans la formation. On peut accuser la hiérarchie de la plupart de ces défaillances. Généralement pas par négligence, mais à cause de la façon dont les officiers de surface sont formés. La base de la formation d’un officier de sous-marin se passe dans le service d’ingénierie ; il y a beaucoup plus de formation théorique et de qualifications pratiques avant que l’enseigne puisse mettre le pied sur son premier sous-marin.”

“Ex Chief” accuse les hauts responsables de la Navy de s’être écartés de l’entretien traditionnel des navires en faveur d’un système d’“enterprise”, dans lequel les commandants traitent les bâtiments comme des “produits” avec l’objectif de pouvoir toujours fournir des forces aux commandants opérationnels qui sont leurs “clients.”

“La décision de gérer l’US Navy comme une ‘enterprise,’ ou quel que soit le terme utilisé aujourd’hui, a été une terrible stratégie puisque l’objectif de toute entreprise est de faire du profit, pas seulement de ‘fournir un produit ou un service.’ Les entreprises qui fournissent un produit sans faire de profit font faillite. Pour moi, ce qui est arrivé à la Navy depuis qu’elle ne peut plus maintenir la préparation au combat ressemble beaucoup à une entreprise qui utiliserait les règles militaires de fonctionnement.”


Lire les 3 messages envoyés les 11 et 18 avril.

Notes :

[1L’équivalent d’ALFAN dans la marine nationale.

Source : NavyTimes (Etats-Unis)