Un nouveau développement dans le domaine de la propulsion navale

  • Dernière mise à jour le 14 septembre 2007.

Une information publiée "accidentellement" sur le site d’une municipalité Russe, qui a maintenant été retirée, dévoile certaines possibilités intriguantes sur l’avenir des sous-marins Russes.

Un sous-marin Kilo

Les détails sur un possible nouveau sous-marin Russe "top-secret" ont été "accidentellement" publiés le 6 septembre dernier par la municipalité de Sarov. L’information, publiée sur le site de la municipalité, a été retirée le 11 septembre, la veille de la publication par le quotidien Russe Kommersant (un journal proche du Kremlin) d’un article révélant l’information. La Marine Russe a démenti avoir connaissance du sous-marin du projet 20120. Mise à part la politique et le faux pas des médias, si elles sont vraies, les caractéristiques de ce nouveau sous-marin pourraient indiquer une avancée Russe dans le domaine de la propulsion AIP [1].

L’AIP est actuellement un ensemble de technologies qui cherchent à accroitre l’autonomie en plongée des sous-marins à propulsion classique. Depuis la 1ère Guerre Mondiale, les sous-marins classiques se sont appuyés sur un moteur diesel électrique. Le moteur diesel permet au sous-marin de naviguer en surface ou proche d’elle avec un snorschel qui aspire l’air frais dans le compartiment moteur. Mais pour avancer en silence et sans snorschel révélateur en surface, le sous-marin passe sur un moteur électrique alimenté par de nombreuses batteries. A faible vitesse, un sous-marin bien construit et bien mené peut être exceptionnellement silencieux — mais son autonomie en plongée est aussi généralement limitée à moins d’une semaine.

Après 2 guerres mondiales et une guerre froide, le système diesel électrique a été poussé plus ou moins à sa limite. Les pays qui ont la technologie et le savoir-faire l’ont remplacé par la propulsion nucléaire. Certaines améliorations continuent d’être apportées (par exemple, avec le dernier sous-marin classique Russe — et bien plus public —, le St. Petersbourg), mais les limites de l’exercice sont atteintes.

Le HMS Gotland Suédois quitte le port de San Diego

A la fois l’Allemagne et la Suède ont déjà combiné les systèmes diesel électriques et AIP. Le système Allemand utilise des piles à combustible à hydrogène alors que le système Stirling Suédois utilise un moteur diesel à circuit fermé alimenté par de l’oxygène liquide. Ces systèmes peuvent être utilisés soit pour avancer à une vitesse faible de 5 à 6 noeuds, soit pour charger les batteries. Les 2 systèmes ont plus que doublé l’autonomie en plongée sans avoir besoin d’utiliser le snorschel ; le U32 Allemand a effectué en avril 2006 un transit de 2 semaines utilisant l’AIP, et le système Stirling pourrait même avoir une endurance plus importante encore.

Le sous-marin Allemand U31 (type U-212A)

La Russie étudie l’AIP depuis longtemps, et Rosoboronexport, le monopole chargé des exportations d’armes Russes, a communiqué qu’un AIP "électrochemique" était disponible en temps qu’"installation après construction" sur ses derniers sous-marins. Mais l’information révélée sur le mystérieux Sarov pourrait indiquer que la Russie a progressé plus loin que beaucoup le pensait — et dans une direction entièrement différente — avec son propre système AIP.

Localisation de la ville de Sarov

La ville de Sarov était autrefois la ville secrète fermée de Arzamas-16, aussi connue comme le Los Alamos Russe pour son rôle dans le programme d’armement nucléaire Soviétique. Alors que la construction de sous-marins nucléaires au chantier Sevmash de Severodvinsk est bien connue, Sarov pourrait un site de recherches approfondies sur les Générateurs thermoélectriques à radio-isotope [2].

Les RTG utilisent la chaleur produite par la désintégration de radio-éléments comme le Plutonium 238 et le Strontium 90 pour produire de l’électricité. Ils sont beaucoup plus simples que des réacteurs nucléaires navals complets et ont été utilisés pour alimenter des phares isolés, des stations météo et des sondes spatiales ne pouvant utiliser l’énergie solaire.

Néanmoins, il reste des difficultés techniques à régler. Les RTG ont été principalement utilisés dans des circonstances où la puissance électrique n’était pas un facteur déterminant. Les RTG modernes utilisés sur les sondes de la NASA produisent quelques centaines de watts et sont de la taille et du poids d’une personne de 55 kg. Mais pour utiliser les systèmes Allemand et Suédois comme références, une puissance de 200 à 300 kilowatts est nécessaire pour l’AIP. Bien qu’une grande partie de cette écart puisse être comblé en concevant un RTG spécialement pour cet objectif et en installant plusieurs RTG à bord du sous-marin, il reste tout de même un bond technologique que les Russes doivent accomplir.

La question n’est de savoir comment se comporterait un AIP basé sur un RTG face aux systèmes Allemand ou Suédois ; mais de savoir que le RTG est basé uniquement sur les connaissance scientifiques Russes — et découvertes dans la ville de Sarov.

Bien que ce ne soit pas un tremblement de terre, un système AIP opérationnel uniquement adapté au matériel militaire Russe est un développement potentiellement important pour la prochaine génération de sous-marins classiques Russes — à la fois pour la défense cotière nationale et pour l’exportation.

Notes :

[1Air-Independent Propulsion : Propulsion indépendante de l’atmosphère.

[2En anglais RTG : Radioisotope thermoelectric generator

Source : Strafor (Etats-Unis)