Du 29 septembre au 3 octobre 2025, la division (…)
Actuellement déployé dans le cadre d’une opération de (…)
Le port de Tema (Ghana) était en effervescence le 30 septembre 2025, alors que le porte-hélicoptères Tonnerre, de la marine nationale française, a accosté sous un ciel clair, marquant le début d’un programme de formation conjoint de quatre jours avec la marine ghanéenne.
Commandé par le capitaine de vaisseau Arnaud Bolelli, le porte-hélicoptères Tonnerre incarnait un partenariat renforcé visant à renforcer la sécurité maritime dans le golfe de Guinée. Cette visite, la plus récente d’une série d’engagements bilatéraux, intervient à un moment où les menaces régionales telles que la piraterie, la pêche illégale et le trafic d’armes exigent des réponses coordonnées. Le golfe de Guinée étant responsable de 95 % des attaques maritimes en Afrique de l’Ouest en 2024, selon le Bureau maritime international, des exercices comme celui-ci soulignent l’urgence de l’interopérabilité entre les forces européennes et africaines.
L’arrivée du Tonnerre a été suivie d’une cérémonie d’accueil : le personnel naval ghanéen était aligné sur le quai tandis que l’orchestre du navire jouait les hymnes des deux nations. Le capitaine Bolelli, débarquant avec l’attaché de défense français au Ghana, le colonel Grégoire Madelin, n’a pas perdu de temps en formalités. Ils ont rendu une visite de courtoisie au commodore Solomon Asiedu-Larbi, commandant en chef du commandement naval de l’Est, dans son bureau surplombant le port. Cette rencontre a réaffirmé des liens de longue date, forgés par des intérêts communs pour la sécurisation des voies maritimes vitales qui acheminent 80 % du volume des échanges commerciaux du Ghana. Le commodore Asiedu-Larbi, vétéran des patrouilles du Golfe, a accueilli la délégation dans une salle de conférence ornée de cartes des points d’étranglement de la région, du golfe du Bénin aux abords de Lagos.
Le capitaine Bolelli a ouvert la discussion en remerciant le Ghana pour son hospitalité et en présentant les objectifs de l’exercice. Il a souligné le rôle du Tonnerre, qui témoigne de « la confiance solide et du partenariat de longue date entre les deux pays pour la sauvegarde du golfe de Guinée », ajoutant qu’il réaffirme « l’engagement de la France à renforcer ses liens de défense avec les forces armées ghanéennes ». Ses propos ont été porteurs de sens ; les navires de la classe Mistral, mis en service en 2006, sont passés du statut de plateformes expéditionnaires à celui de plateformes polyvalentes pour les opérations multinationales, accueillant des appareils allant des chasseurs Rafale aux barges de débarquement dans des scénarios hybrides. Le Tonnerre, avec son déplacement de 32 000 tonnes et son pont-coffre inondable pour le lancement de véhicules, illustre cette adaptabilité, ayant soutenu les opérations françaises au Sahel et en Méditerranée.
Le commodore Asiedu-Larbi a chaleureusement répondu, saluant l’initiative comme « une plateforme précieuse pour renforcer les échanges professionnels et la préparation opérationnelle ». Il a assuré la pleine participation de la marine ghanéenne et s’est dit confiant que cette collaboration « renforcerait davantage la sécurité maritime et la stabilité régionale ». Cet échange a instauré une dynamique collaborative, comblant le fossé entre l’expérience française en haute mer et l’orientation littorale du Ghana. La marine ghanéenne, dotée d’équipements comme le patrouilleur GNS Cheetah et de navires de soutien offshore, patrouille quotidiennement 550 kilomètres de côtes, luttant souvent contre des flottes sous-équipées face à des pirates lourdement armés. La France, grâce à sa présence permanente au Gabon et à Djibouti, a une portée mondiale ; des exercices conjoints comme celui-ci s’appuient sur l’exercice Obangame Express de 2024 , où des marins ghanéens et français se sont entraînés à arraisonner des navires contre des pirates de l’air simulés.
Ce programme de quatre jours, qui se déroule jusqu’au 3 octobre, allie exercices pratiques et partage de connaissances afin d’affiner la réponse aux crises. Le cours régional de formation embarquée et numérique (SIREN 2025), pierre angulaire des initiatives régionales menées par la France, est au cœur du programme. SIREN couvre les techniques de sauvetage maritime, les protocoles de contrôle de la pollution, les tactiques de lutte contre la piraterie, les cadres de gestion de crise et les mécanismes de coopération régionale. Les participants embarqueront à bord du Tonnerre pour des séances pratiques, simulant des interventions en cas de déversement d’hydrocarbures sur le pont-coffre ou coordonnant des opérations de recherche et de sauvetage par hélitreuillage depuis le pont d’envol. Les éléments numériques incluent une formation à la cyber-sécurité, essentielle face à la multiplication des attaques de pirates informatiques dans le Golfe qui ciblent les systèmes de navigation ; un rapport d’Interpol de 2025 a constaté une augmentation de 40 % des incidents de rançongiciels maritimes au large de l’Afrique de l’Ouest.
Les échanges médicaux constituent un autre pilier : des chirurgiens de la marine française effectueront des démonstrations de soins traumatologiques à bord de l’hôpital de 69 lits du navire, équipé de blocs opératoires et de salles de radiologie. Les médecins ghanéens appliqueront également les protocoles relatifs aux maladies tropicales, en s’appuyant sur leur expérience des épidémies de choléra liées aux itinéraires de contrebande. Les interactions professionnelles favorisent le travail d’équipe ; des équipages mixtes effectueront des simulations sur la passerelle, s’exerçant à gérer les signaux de détresse conformément aux normes de l’Organisation maritime internationale. Ces sessions comblent des lacunes réelles : lors d’une flambée de piraterie en 2024, les patrouilles ghanéennes ont retardé leurs interventions en raison de problèmes de communication avec leurs partenaires internationaux, une faille que SIREN vise à corriger.
Cet exercice s’inscrit dans les tendances de 2025 en matière de coopération navale, où des exercices biennaux comme Bright Star et Obangame évoluent pour contrer les menaces hybrides. Le recentrage de la France vers l’Indo-Pacifique laisse ses engagements atlantiques à des alliés comme le Ghana, le déploiement du Tonnerre témoignant d’un investissement soutenu. Les exemples concrets abondent : en mars 2025, des équipes franco-ghanéennes dans le cadre de l’opération Corail ont intercepté une cargaison de cocaïne au large du Togo, saisissant 1,5 tonne d’une valeur de 50 millions de dollars, grâce aux signaux radar partagés du groupe aéronaval Charles de Gaulle. De même, des patrouilles conjointes en 2024 ont permis de dissuader le détournement d’un pétrolier battant pavillon libérien, les gardes-frontières ghanéens bénéficiant du soutien de la surveillance française.
Des implications plus larges s’étendent à la sécurité économique. Selon la CNUCED, le golfe de Guinée a perdu 1,2 milliard de dollars en raison de la piraterie en 2024, menaçant les 15 milliards de dollars d’exportations pétrolières annuelles du Ghana. L’interopérabilité renforcée grâce au SIREN permet à la marine ghanéenne, renforcée par des patrouilleurs offerts par les États-Unis, de diriger des forces opérationnelles multinationales, réduisant ainsi sa dépendance à l’aide extérieure. L’assurance d’un engagement total du commodore Asiedu-Larbi en témoigne ; le livre blanc de la défense du Ghana pour 2025 privilégie les capacités amphibies, envisageant des acquisitions de type Mistral par le biais de partenariats.
En quittant Tema le 3 octobre à destination du Sénégal, le Tonnerre laisse derrière lui bien plus que de la bonne volonté. Ce programme renforce un cadre où les marines transcendent les frontières, transformant des zones potentiellement sensibles en zones de coopération. À une époque de mers disputées, de tels liens garantissent que le Golfe demeure un vecteur de prospérité, et non de péril. Pour le Ghana et la France, la visite du Tonnerre consolide un partenariat aussi durable que les courants atlantiques qu’il sillonne.
Source : Military Africa (Nigéria)