La force sous-marine américaine expérimente des mesures anti-fatigue

  • Dernière mise à jour le 16 juin 2021.

Un groupe de chercheurs de l’US Navy étudie l’efficacité de lunettes bloquant la lumière bleue et de lampes émettant de la lumière bleue contre la fatigue et le manque de sommeil qui affectent souvent les sous-mariniers privés de lumière naturelle. En plongée, les sous-mariniers ne sont pas exposés à la lumière du soleil et à la nuit. Leur exposition constante à la lumière naturelle peut affecter leur rythme circadien, l’horloge naturelle qui détermine quand on est alerte ou endormi.

« Quand nous avons commencé à étudier la fatigue, nous avons cherché à en connaître les raisons » et les différences avec la fatigue rapportée par les équipage de bâtiments de surface, explique Sarah Chabal, chercheur en psychologie au Naval Submarine Medical Research Laboratory de Groton.

« Une de ces différences est l’exposition à la lumière du soleil... Nous savons que les personnes sont, en général, impactés par l’exposition à la lumière du soleil. »

L’exposition à de la lumière bleue, une des composantes de la lumière du soleil, à une période synchronisée avec un rythme de 24 heures de jour et de nuit, aiderait à rester alerte durant les quarts et à se reposer durant les périodes de sommeil. Mais s’écarter de ce rythme, comme s’exposer à la lumière bleue de nuit, durant les quarts ou les périodes de travail, peut dérégler le cycle naturel et conduire à un sommeil de mauvaise qualité, à de la fatigue, de l’inattention et à d’autres problèmes.

Les chercheurs du NSMRL voulaient voir si exposer ou protéger un marin de la lumière bleue pourrait l’aider à être plus alerte et avoir un meilleur sommeil. Une expérimentation a été menée à la fin de l’année dernière à bord du sous-marin nucléaire d’attaque USS Vermont.

Parmi les 42 officiers et hommes d’équipage qui se sont portés volontaires, 2 groupes ont été constitués. L’un a reçu une paire de lunettes à verre orange permettant de bloquer la lumière bleue et une paire produisant de la lumière bleue au niveau des yeux. L’autre groupe n’a rien reçu. Les 2 groupes de volontaires ont noté leurs périodes de travail, de sommeil et de repos en portant des senseurs au niveau de la poitrine. Ils ont aussi répondu à des questionnaires sur leur qualité de sommeil et l’utilisation des lunettes.

L’exposition à la lumière « est très facile à contrôler, » explique Chabal. Des recherches précédentes ont montré que l’éclairage à bord des sous-marins « ne comporte pas toutes les nuances de couleur de la lumière naturelle du soleil » qui aide à maintenir le rythme circadien.

Pour cette étude, les chercheurs ont voulu exposer les sous-mariniers à de la lumière bleue le matin puis, le soir, bloquer leur exposition à la lumière bleue. Cette lumière d’une longueur d’onde d’environ 470 nm peut aussi provenir de divers écrans.

Avec ces 2 types de lunettes, l’objectif était de les placer « dans le même rythme » que s’ils étaient à l’extérieur, à la lumière du jour et la noirceur de la nuit.

Les conclusions de l’étude n’ont pas encore été rédigées. Mais un premier examen des données recueillies montre de « plus longues durées de sommeil chaque nuit parmi le groupe qui portait les lunettes par rapport à ceux qui n’en portaient pas. Cela se reflète aussi dans leur auto-évaluation de leur fatigue durant la journée, » explique Chabal. « Le groupe qui portait les lunettes a noté se sentir moins fatigué que le groupe qui ne les portait pas. De plus, les volontaires ont très bien respecté le port des lunettes. C’est très prometteur. »

Pour cette étude, les sous-mariniers ayant les lunettes portaient celles émettant la lumière bleue le matin et portant celles qui la bloque la nuit.

« Nous voulions être aussi invisibles que possible vis-à-vis des opérations du sous-marins. »

Chaque participant portait un enregistreur de poitrine qui recueillait des informations sur les mouvements et le sommeil. L’étude s’est déroulée sur environ 3 semaines.

Ils les ont porté autant que possible, y compris durant leur temps de repos. Toutefois, les opérations ou l’entretien les a parfois obligé à les retirer. « Il ne s’agit pas d’un laboratoire. Ils se trouvaient à bord d’un sous-marin nucléaire. donc, s’ils devaient faire quelque chose pour leur travail, nous l’indiquons dans l’étude, » explique un chercheur.

Les participants qui portaient les lunettes « ont senti qu’ils dormaient mieux et je pense que les données le montreront, » a-t-il indiqué. Alors qu’ils n’ont pas pu les conserver, comme ils sont disponibles dans le commerce, certains marins ont demandé à les acheter en propre.

Au cours des 10 dernières années, de plus en plus de recherches sont menées, de plus en plus de données sont recueillies sur le sommeil des marins et des sous-mariniers. Les sous-mariniers d’aujourd’hui disent dormir aussi bien que les autres militaires et les civils.

La clé serait le passage d’une journée de 18 heures (6 heures de quart et 12 heures de repos) à une journée de 24 heures (8 heures de quart et 16 heures de repos). « C’est une bonne chose, » explique un chercheur. « Le sommeil est de meilleure qualité, et nous avons des raisons de croire que les rythmes circadiens sont meilleurs. »

Source : US Naval Institute (Etats-Unis)