Le projet de nouveau sous-marin espagnol prend l’eau et provoque une crise avec la France

  • Dernière mise à jour le 1er mars 2007.

Il devait être le joyau de la couronne de la Marine Espagnole et l’un des sous-marins non-nucléaires les plus avancés au monde. Mais celui qu’on connaît comme le S-80, qui doit remplacer la série 60, non seulement n’avance pas avec la rapidité qu’il devrait mais a provoqué la rupture d’une alliance remontant àdes années avec les Français de DCN.

La preuve qu’il n’avance pas est que, finalement, Navantia n’a pas proposé ce sous-marin au récent appel d’offres ouvert par le Pakistan pour acheter 6 sous-marins. “Ils ont acheté les documents du concours, ils ont amené les Pakistanais à l’arsenal de Carthagène pour leur montrer les installations et ils leur ont demandé une prolongation de 70 jours pour présenter une offre. Mais au final, ils ne l’ont pas présenté”, assurent des sources du secteur.

Selon ce que disent ces sources, “ils ne l’ont pas présenté parce qu’ils ne savent toujours pas comment sera le sous-marin, quelle conception il aura, s’il pourra lancer les missiles Tomahawk, de quel type de lanceurs il a besoin…”. Malgré cela, Navantia vient de payer 10.000 euros pour les documents d’un autre appel d’offres, cette fois pour la Marine Turque, qui souhaite aussi acheter 6 sous-marins.

José Antonio Alonso bavarde avec Donald Rumsfeld

L’autre problème est précisément celui des missiles Tomahawk. Bien que, l’an dernier, le secrétaire Américain à la défense de l’époque, Donald Rumsfeld, ait autorisé la vente de ces missiles à l’Espagne, il ne l’a pas fait pour l’instant en ce qui concerne le système de guidage, qui est réellement le point fondamental. Sans ce système, qui guide le missile vers sa cible avec une précision millimétrique, les Tomahawk sont moins des Tomahawk.

L’opération S-80 a été lancée par l’ancien Premier Ministre Aznar avec la promesse de Bush de lui vendre aussi le système de guidage. Mais après la détérioration des relations entre les Etats-Unis et l’Espagne, il sera difficile que ce projet arrive à bon port. Il sera aussi presqu’impossible, avec Zapatero au pouvoir, que les Américains recommandent à leurs Alliés d’acheter le S-80 de préférence aux modèles français ou allemand (Les Etats-Unis ne construisent que des sous-marins nucléaires).

Les relations avec les Français sont rompues

Le pire de tout est que, en plus de perdre l’appui américain, les relations avec les Français sont aussi rompues. “Ils ne se parlent pas”, assurent des sources connaissant la situation. Précisément, Navantia et le Français DCN ont un accord pour construire conjointement le sous-marin Scorpène et répondre ensemble aux appels d’offres. Ainsi, la charge de travail dont dispose en ce moment même le chantier de Carthagène sont les contrats avec la Malaisie et l’Inde. En pratique, Carthagène dépend de la charge de travail que lui sous-traitent les Français parce que le design du Scorpène leur appartiennent.

Mais, depuis que l’Espagne a décidé de concevoir un nouveau sous-marin en solitaire, les Français ont décidé de ne plus présenter le Scorpène (dont ils auraient dû céder une partie de la construction à l’Espagne) dans les appels d’offres internationaux, et ils ont conçu un nouveau sous-marin, pratiquement le même que le Scorpène, mais qu’ils utilisent pour contourner l’accord avec l’Espagne. Ils ont appelé ce nouveau sous-marin Merlin, et c’est celui que la France a proposé au Pakistan et maintenant aussi à la Turquie.

Par conséquent, l’Espagne a perdu la charge de travail que lui donnait la France pendant que le développement de son propre sous-marin n’avance pas. On entend même des rumeurs dans les corridors du ministère de la défense que le mieux serait d’arrêter le projet et de le reconsidérer. “Il y a prochainement des élections [1], ils ne vont donc rien faire”, prévoient les sources du secteur.

Notes :

[1Des élections municipales sont prévues le 8 octobre 2007.

Source : El Confidencial Digital (Espagne)