Des sous-marins pour la Marine Indienne

  • Dernière mise à jour le 16 décembre 2005.

Un article de la presse indienne indique que la Marine de ce pays va obtenir 2 sous-marins Akula en location et que l’entraînement devait commencer prochainement. Maintenant que le contrat d’achat des Scorpène Type 75 a été signé, l’accord longtemps attendu est une réalité. La conception des Scorpène est basée sur celle des sous-marins nucléaires français et c’était un plus pour la Marine Indienne.

Un ancien Chef d’Etat-Major de la Marine s’était opposé à la télévision à cet accord, à cause de son supposé manque de clareté, de la même manière qu’un ancien CEMM s’était opposé à l’accord sur le porte-avions Gorshkov. Cependant, leurs voix ne semblent pas avoir compté, sinon que leurs déclarations et leurs écrits pourraient avoir retardé les accords — on se demande pourquoi des anciens officiers de marine de haut-rang n’ont laissé tranquille les amiraux actuels et ne leur ont pas fait confiance pour prendre les bonnes décisions — et profiter du gateau comme l’ont fait leurs prédécesseurs, sauf que le gateau est maintenant plus gros et meilleur ! Mais cela est une autre histoire...

Le Chef d’Etat-Major de la Marine, l’amiral Arun Prakash, d’autres dignitaires et la presse étaient présents à la signature (on peut se demander si les ex-CEMM étaient invités). L’accord est le plus important signé par la Marine jusqu’à présent. Le CEMM venait juste de rentrer d’une visite de 3 jours au Japon, où il a visité la base de l’US Navy à Yokusaka et eu des discutions avec les Japonais, qui souhaitent se charger de la sécurité de leurs voies d’approvisionnement en énergie dans l’Océan Indien.

Scorpène

Les 2 premiers sous-marins (Scorpène, NDT) seront fournis en pièces déctachées. Ils seront entièrement de conception française et équipés de SM 39 Exocet. Pour les quatre suivants, la Marine Indienne sera libre de choisir l’équipement de son propre choix. La Marine est ambitieuse et a l’espoir d’adapter les navires à la propulsion nucléaire sic’est techniquement faisable. Le premier sous-marin sera admis au service actif en 2012 et nos bons voeux accompagnent la Marine et le chantier naval MDL.

Akula — Predator of the Deep
By Sayan Majumdar

Selon des articles parus dans la presse, l’Inde se dispose à louer à la Russie 2 sous-marins nucléaires d’attaque multi-missions de troisième génération Akula, avec la possibilité évidente de les acheter. Les formalités officielles pourraient être terminées d’ici l’an prochain. Selon certaines sources, la construction récente d’un centre d’entraînement à Sosnovy Bor, à l’ouest de St Petersbourg, pour les officiers de marine Indiens, confirme les intentions de la Russie de louer des Akula à l’Inde. Ce centre international de formation a commencé en septembre 2005 avec 300 officiers indiens, dont les futurs équipages des Akula.

Incidemment, le centre entraîne aussi les officiers de marine Russes et abrite des réacteurs nucléaires pour sous-marins fonctionnels. Il est utilisé pour tester le carburant nucléaire des réacteurs, ainsi que d’autres technologies applicables aux réacteurs nucléaires des sous-marins. Par conséquent, l’installation des officiers indiens sur le Centre soulignent les implications qui vont au-delà de la location des Akula et peuvent conduire à fournir aux Indiens une formation et une expertise suffisante pour qu’ils développent leurs propres sous-marins nucléaires.

Cette remarque est encore plus pertinente si l’Advanced Technology Vessel [1] est, en fait, une version adaptée du projet russe 885, un SNA du type Yasen/Severodvinsk, lui-même une amélioration des SNA de type Akula, avec des fonctions avancées comme une antenne sonar sphérique, des tubes lance-torpilles divergents et un système de lancement de missiles à la verticale. Un ATV avec des ascendances russes et certaines fonctions avancées reprises des sous-marins français du type Scorpène, comme le système de gestion d’information et de combat SUBTICS, donnera naissance à une formidable plateforme pour la dissuasion nucléaire.

Les 2 SNA Akula, l’un terminé entre 70 et 85 % et l’autre entre 40 et 60 %, attendent d’être achevés au chantier naval de Komsomolsk-on-Amur. Malgré des informations contradictoires, l’un d’entre eux serait le K-152 Nerpa (The Seal) au stade final de construction et pourrait être destiné à la Marine Indienne. Les SNA Akula pourraient se voir attribuer le rôle principal dans la lutte ASM (anti-sous-marine) pour accompagner le groupe de bataille d’un porte-avion, naviguant à quelque distance en avant du groupe pendant qu’un autre SNA le suit pour protéger ses arrières. Pour citer un parallèle, l’Akula K-461 Volk de la marine Russe a fourni une couverture ASM au groupe du porte-avions “Admiral Kuznetsov" lors de son déploiement lointain en 1995-96.

Les SNA d’origine russe du projet 971 Shuka-B sont connus en Occident comme la classe Akula, du nom du premier sous-marin, le K-284 Akula. D’une conception faisant suite à celle du Victor III, les SNA Akula et les SNA du projet 945 (type Sierra) ont posé pour la première fois des problèmes sérieux aux marines occidentales en terme de technologies sous-marines. Véritables navires à vocations multiples, les Akula, en plus de remplir leurs engagements ASM, peuvent aussi frapper des groupes de navires hostiles ou des installations cotières. Dès la conception, le silence était une priorité pour les ingénieurs Russes alors que les marines occidentales jouissaient traditionnellement d’un avantage important dans ce domaine. Le Malachite Marine Engineering Bureau de St. Petersbourg, sous la direction de Georgy Chernyshev, a développé le sous-marin du projet 971, utilisant une coque en acier. La conception a commencé en 1976. Yuri Farafontov a succédé à Georgy après son décès en 1997.

Avec 110 mètres de long (Akula II), l’Akula possède une double coque séparée par une distance considérable pour réduire les dommages possibles à la coque intérieure. La construction à double coque augmente aussi la réserve de flottabilité du sous-marin de près de 3 fois par rapport à un navire à simple coque. Les ballasts sont situés entre les coques intérieure et extérieure. Des limber-holes permettent à certaines sections de communiquer avec la mer. Pour naviguer en silence, des obturations permettent de réduire ou supprimer cette source de bruit. La coque est en acier faiblement magnétique, et divisée en 7 compartiments, et possède une distinctive high aft fin. L’extrémité arrière de l’Akula semble découler de mesures destinées à limiter le bruit de propulsion. Elle va faciliter l’isolation de la propulsion et des pompes associées de la coque en les installant sur un berceau insonorisé. Les efforts de réduction de bruit se sont portés sur les supports de la propulsion, l’isolation du support par rapport à la coque et l’installation de tuiles anéchoïques à l’intérieur et à l’extérieur des coques. Certains rapportent aussi que des techniques d’annulation active du son ont été installées.

Les sous-marins ont été construits aux chantiers navals de Komsomolsk-on-Amur et de Severodvinsk. 7 sous-marins du projet 971 (Akula I) ont été construits entre 1986 et 1992, et 3 du projet 971 U (Akula amélioré) entre 1992 et 1995. 3 sous-marins du projet 971A (Akula II), avec une coque allongée et des technologies de réduction de bruit améliorées, ont suivi. Le troisième, le K-335 Gepard, a été admis au service actif dans la Marine Russe en août 2001 et possède la caractéristique d’avoir été le premier SNA russe admis au service actif au 21ème siècle. Classé comme Akula III, les fonctions avancées du Gepard permettent de le classer comme un sous-marin de génération 3 +. En terme de caractéristiques et de performance, il est très proche des sous-marins nucléaires de 4ème génération. Le Gepard semble plus allongé et relativement creux sur les flancs pour recevoir des éléments retractables. La gondole proéminente de l’antenne du sonar remorqué, montée au sommet de la barre de direction semble plus compact.

L’Akula II mesure 110 mètres et déplace jusqu’à 13.800 tonnes. Il peut avancer jusq’à 33 nœuds en plongée, grâce à la propulsion constituée d’un récateur VM-5 à eau pressurisée avec un cœur modèle OK-650B à haute-densité d’une puissance de 190 MW, une turbine GT3A développant 35 MW qui entraîne une hélice à 7 pâles fixes. L’immersion opérationnelle de plongée est de 520 mètres et l’immersion maximale de 600 mètres. Par conséquent, s’il est employé dans un rôle plus offensif, la grande vitesse en plongée et la possibilité de plongée profonde rend le SNA Akula capable d’échapper à un spectre très large d’ennemis ASM en passant sous eux. Les armes ASM lancées depuis la surface, comme les torpilles, mettraient un temps considérable pour atteindre l’immersion opérationnelle de l’Akula qui serait donc probablement au-delà de la portée de détection acoustique de l’arme.

Plus encore, l’Akula possède la capacité de s’approcher de la thermocline permanente au fond des océans pour exploiter son formidable sonar MGK-503M Skat (Shark Gill) avec des antennes de flanc sur environ un tiers de la longueur de la coque. En actif, le sonar permet la détection automatique des cibles en bande proche ou éloignée. En passif, l’écoute des sources hostiles diminue le risque de détection. Le processeur de signal du sonar est suffisamment flexible pour détecter et classifier automatiquement les cibles et aussi pour rejeter le bruit acoustique ambiant et s’adapter aux conditions acoustiques variables.

La couche thermale ou “thermocline” a une influence majeure sur les opérations ASM, puisqu’elle affecte la célérité du son dans l’eau. Dans la thermocline permanente (trouvée à des immersions de 300 à 400 m dans les zones équatoriales et 500 à 1.000 m dans les zones sub-tropicales), la célérité atteint son minimum. Cette couche d’eau de célérité minimale, connue comme le chenal profond, possède un certain nombre de propriétés. Il est théoriquement possible qu’un sous-marin puisse opérer dans ce chenal profond, exploitant sa propriété pour obtenir des détections à très longue portée. De plus, dans les derniers Akula, un certain nombre de senseurs non-acoustiques apparaissent sur le bord avant du gouvernail permettent de détecter les unités de surface ennemies.

Pour compléter ces formidables senseurs, le système de communication par satellite Molniya-M/Pert Spring permet une meilleure prise en compte de la situation, critique dans les missions de poursuite et d’interception des flottes hostiles. L’Akula russe K -154 Tigre, sous le commandement d’Aleksey Burilichev, aurait réussi à suivre discrètement dans son “sanctuaire SNLE” à au moins une occasion.

Les SNA Akula bénéficient d’une distance d’attaque considérables contre des sous-marins ennemis puisque son armement ASM à changement de milieu (trajectoire sous-marine, vol aérien, trajectoire sous-marine) est constitué du missile Novator Tsakra (SS-N-15 ‘Starfish’) et du Novator (SS-N-16 ‘Stallion’). Le Starfish, lancé depuis les 4 ou 6 tubes de 533 mm, possède une portée de 45 km (vol inertiel). Le Stallion, lancé depuis les 4 tubes de 650 mm, possède une portée jusqu’à 100 km. A la fois le Stallion et le Starfish peuvent être équippés d’une tête nucléaire de 200 kt. L’Akula dispose aussi d’une torpille de Type 40 pour répondre aux circonstances tactiques. Pour la Marine Indienne, la variante 91RE1 du missile de croisière Klub pourrait faire partie des options. Le 91RE1 est conçu pour être lancé depuis un tube de 533 mm jusqu’à une immersion de 150 mètres et une vitesse du sous-marin inférieure à 15 nœuds. A l’immersion maximale de lancement, la portée du missile peut aller jusqu’à 50 km.

Pour des navires de surface ennemis, l’Akula est une menace potentielle. Pour attaquer les navires ennemis, l’Akula est armé de 2 types de munitions dévastatrices. Le missile de croisière anti-navire PJ-10 BrahMos est une arme développée en commun par DRDO, Inde et NPO Mashinostroyeniya (NPO Mash), Russie. Le BrahMos dispose d’une faible surface apparente radar et d’un radar pour le guidage vers la cible pour faciliter le fonctionnement « fire-and-forget ». Divers types de trajectoires de vol, dont le rase-vague ou la montée terminale suivie d’un piqué mortel, viennent compliquer la tâche de l’adversaire. Le guidage à mi-course est inertiel, développé et amélioré par les scientifiques indiens. Une portée de 290 km pour une vitesse supersonique (Mach 2.8) permettent une faible dispersion sur la cible, un engagement plus rapide et une capacité de destruction plus importante, aidée par l’importante énergie cinétique de l’impact. Dans la plupart des cas, le navire cible n’aura pas le temps de réagir, même s’il est en alerte. Le missile semble avoir été développé pour pénétrer les défenses de plus en plus sophistiquées des navires, radars, missiles, ...

Le BrahMos sera encore plus mortel lorsque les concepteurs indiens de logiciel réussissent à améliorer le système de guidage, déjà formidable, du prédécesseur du BrahMos, le SS-N-26 Yakhont, qui a bénéficié de toute l’expérience de NPO Mash dans le développement de systèmes électroniques d’intelligence artificielle. Ainsi, en cas de lancement en salve, un groupe de missiles BrahMos pourra se répartir les cibles en fonction de leur importance et choisir le plan d’attaque le plus approprié. Le système de contrôle indépendant surveillera les données issues des contre-mesures électroniques et des contre-contre-mesures électroniques. Il déterminera la meilleure méthode pour échapper aux tirs des systèmes de défense anti-aériens de l’ennemi. Après avoir détruit la cible principale d’un groupe de navires de surface, les missiles restants vont détruire les autres navires, éliminant dans le processus de sélection la possibilité d’utiliser 2 missiles sur la même cible.

En plus du BrahMos, la torpille lourde RK-55 GRANAT propulsée par une fusée peut même détruire un porte-avions de 100.000 tonnes grâce à 2 coups au but. La nature très furtive du SNA Akula signifie que l’arrivée imminente d’un BrahMos ou d’un Granat ne sera probablement pas détecté avant le “moment final” s’il l’est, rendant impossible toute contre-mesure. Dans les cercles navals, il est bien connu et accepté que les missiles anti-navires lancés depuis un sous-marin en plongée constituent la menace la plus mortelle de toutes.

En surface, le SNA dispose d’une capacité de défense aérienne fournie par le missile lancé à l’épaule SA-N-5/8 (un lanceur et 18 missiles). Les limitations sont ici évidentes et un système de missiles anti-avions et hélicoptères qui pourrait être lancé sur un hélicoptère stationnaire par un sous-marin en plongée semble obligatoire, puisque des découvertes auraient été faites récemment dans ce domaine.

La difficulté pour la Marine Indienne sera de maintenir l’“aspect stratégique” des Akula qu’elle va introduire dans sa flotte. La conception des sous-marins du projet 971 était parvenue à une certaine participation à la dissuasion nucléaire, aux environs de 1978-80, puisque les plans avaient été modifiés pour que le sous-marin puisse recevoir jusqu’à 12 missiles stratégiques de croisière RK-55 Granat (SS-N-21 Sampson) “Tomahawkski”, équipés d’une tête nucléaire de 200 kt, pour des frappes de précision contre des installations côtières à haute valeur et des cibles spécifiques à l’intérieur des terres. Le système de guidage combine la navigation inertielle-Doppler et la correction de la position basée sur la comparaison du terrain dans les régions traversées avec des images stockées dans la mémoire de l’ordinateur embarqué.

Le système de propulsion est un moteur à double flux situé sous la queue du missile. L’erreur circulaire probable (ECP) est un respectable 150 mètres. Le missile vole à une altitude d’environ 200 m pour une vitesse de Mach 0,7 pour compliquer les procédures d’interception de l’ennemi. A la lumière de circonstances actuelles, la Marine Indienne devrait demander l’intégration de ce missile particulier dans sa petite flotte d’Akula pour augmenter la capacité de représaille stratégique de la nation. A la lumière de la prolifération rampante de missiles ballistiques et de croisière dans son “voisinage immédiat”, l’Inde n’est pas en position de respecter, bien qu’elle n’en soit pas signataire, le régime de restrictions du contrôle technologique des missiles dans les “sphères critiques”.

Finalement, il a été indiqué qu’au chantier de Severodvinsk, le travail avance pour la construction de 2 autres Akulas, le “Cougar” et le “Lynx”. Si la Marine de l’Armée Populaire de Libération de la Chine est effectivement intéressée par ces 2 navires, la Marine Indienne devrait aussi proposer le même prix. On peut penser avec un certain degré de certitude que, contre un prix décent, les responsables russes seraient heureux de livrer ces 2 Akulas supplémentaires à la Marine Indienne plutôt qu’à leur voisin immédiat, pour des raisons stratégiques clairement établies.

Par Sayan Majumdar

Notes :

[1ATV : navire à technologie avancée

Source : India Defense