La lutte contre la piraterie forge des alliances improbables

  • Dernière mise à jour le 12 novembre 2009.

Des grandes puissances, dont les Etats-Unis, la Russie et la Chine, s’associent en mer pour lutter contre les pirates des côtes de Somalie. Une forte augmentation des attaques a forcé des nations qui peuvent être rivales à terre, à constituer des alliances improbables.

Des experts expliquent que la transition de la compétition à la coopération va aussi aider à protéger les budgets des marines dans des pays comme les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, qui mènent des guerres terrestres en Irak et en Afghanistan.

“Il est remarquable que, dans un endroit qui est généralement considéré comme n’étant pas le plus stratégiquement important sur Terre, vous trouviez les Chinois, les Russes, les Américains, les Indiens, tous luttant contre un ennemi commun,” remarque un expert en piraterie, Roger Middleton.

“Ils se sont entraînés à se battre les uns contre les autres, pas contre de petits ennemis,” poursuit-il.

Les pirates ont lancé de plus en plus d’attaques dans le golfe d’Aden et en océan Indien. Ils détiennent actuellement près de 250 otages, dont 2 britanniques. Au cours de la seule dernière semaine, 3 navires ont été pris.

Selon la 5è flotte américaine, ce sont 25 bâtiments appartenant à 14 nations, qui patrouillent actuellement dans le golfe d’Aden et l’océan Indien.

En septembre dernier, la Russie et la Chine ont annoncé qu’ils allaient mener des patrouilles communes de lutte contre la piraterie, dans le cadre d’une opération “Blue Shield”. De nombreux pays non-alignés, comme le Japon ou la Corée du Sud, ont aussi envoyé des bâtiments dans la région. La Russie soutient aussi les patrouilles de l’OTAN.

Le Cmdr. James Kraska, un professeur du Center for Naval Warfare Studies, indique que tous ces pays, à l’exception de l’Iran, partagent les informations et la protection.

Les responsables de ces différentes forces se réunissent une fois par mois pour partager les informations et se partager les zones de responsabilité. La semaine dernière, les marines de 26 pays, dont l’Union Européenne, l’OTAN, la Chine, l’Inde, le Japon et la Russie, se sont réunies. Pour la première fois, l’Ukraine a participé à la réunion.

“Le point important est qu’il s’agit d’une coopération sans précédent entre tous les participants à la lutte contre la piraterie dans le golfe,” explique le Cmdr. John Harbour, porte-parole de la force européenne.

La coopération ne se déroule pas toujours sans problème. Les Etats-Unis, l’Inde et le Pakistan ont des matériels de cryptographie non compatibles, explique Christensen. Et les Chinois et les Américains ont interdit toute communication utilisant les adresses email officielles (sur des serveurs militaires) par crainte d’espionnage. Les équipages échangent donc des emails en utilisant des adresses de Yahoo ou Hotmail, indique Middleton.

Les différentes marines ont réussi à surmonter les obstacles pour s’aider les unes les autres, même si, à terre, leurs gouvernements respectifs sont à couteaux tirés. En mai dernier, un bâtiment sud-coréen a envoyé son hélicoptère au secours d’un cargo nord-coréen qui était attaqué.

En septembre, une frégate turque a poursuivi des pirates qui attaquaient un porte-conteneur grec, malgré le fait que les négociations entre la Turquie et la Grèce sur Chypre ont été rompues à de nombreuses reprises.

“Aucun pays ne peut le faire seul,” explique Krasaka.

Il est probablement plus facile pour des forces navales de coopérer que pour des forces terrestres. La tradition maritime veut que les marins soient obligés de porter assistance à un navire en détresse, et personne n’a de revendication territoriale en mer.

Même en travaillant ensemble, les bâtiments ne peuvent empêcher toutes les attaques. L’océan Indien et le golfe d’Aden sont tout simplement trop vastes. Les experts expliquent que l’appât de rançons de plusieurs millions de $ est trop fort pour des somaliens, un pays ravagé par une guerre civile, qui n’a pas eu de gouvernement stable depuis 20 ans et dont la moitié de la population dépend d’une aide humanitaire.

Source : Navy Times (Etats-Unis)