Forte probabilité pour la signature d’un accord nucléaire entre la France et la Grande-Bretagne

  • Dernière mise à jour le 8 octobre 2010.

Depuis plus de 10 ans, la Grande-Bretagne et la France discutent d’une coopération dans le domaine de la défense — sans grand résultat jusqu’à présent.

Mais alors que David Cameron, premier ministre britannique, et Nicolas Sarkozy se préparent pour leur premier sommet bilatéral dans un peu plus de 3 semaines, il y a des signes qui suggèrent que Downing Street et l’Elysée souhaitent des résultats concrets.

Le fait même que des responsables français et britanniques cherchent à trouver un accord sur la maintenance de têtes nucléaires, indiquent l’ampleur de l’accord souhaité par les 2 parties. Aucun aspect de la souveraineté française ou britannique n’est plus jalousement gardée que la dissuasion nucléaire.

Les Britanniques n’ont jamais collaboré avec les Français dans aucun domaine de leur dissuasion, basée sur le missile américain Trident D5. Dans le même temps, la France a gardé un contrôle strict sur les secrets liés à “la force de frappe”, son système de lancement depuis des sous-marins ou des avions de chasse, de conception entièrement française.

Au cours des dernières semaines, néanmoins, il y a eu des signes que les 2 parties se préparaient finalement à discuter nucléaire. Pour la première fois, des responsables britanniques ont été récemment invités à visiter la flotte de SNLE français dans le port de Brest. En retour, une visite a été faite par des responsables français à la flotte de SNLE Vanguard à Faslane en Ecosse.

“Nous avons enfin pu voir par nous-même ce que l’autre a”, explique un responsable qui a participé à l’une des visites. “C’était un moment marquant.”

Trouver des axes de collaboration dans le domaine de la dissuasion nucléaire n’est cependant pas facile. L’idée de travailler ensemble sur les futures SNLE ou missiles britanniques n’a jamais été sérieusement envisagé. Il y a eu des spéculations que les 2 côtés pourraient coordonner leurs patrouilles de sous-marins dans l’Atlantique, leur permettant ainsi de réduire le nombre de sous-marins, mais cela n’a pas été considéré comme une possibilité réaliste.

Un accord pour travailler sur un entretien commun des têtes nucléaires — que la France et la Grande-Bretagne construisent eux-mêmes — pourrait être possible.

Depuis 1996, la France, comme la Grande-Bretagne, a signé le Traité d’Interdiction complet des essais nucléaires. Depuis, la mise en œuvre et la disponibilité des armes françaises sont garanties par la simulation d’explosions nucléaires.

La France a investi beaucoup dans ses installations de recherche, injectant 6,6 milliards € dans son programme de simulation rien qu’en 2009. Elle a récemment installer le plus puissant ordinateur en Europe pour analyser les résultats.

Au contraire, les spécialistes expliquent que la Grande-Bretagne s’est laissé dépasser dans sa capacité de recherche nucléaire. Par conséquent, la Grande-Bretagne aurait intérêt à participer au programme de simulation français, plutôt que de construire sa propre installation.

Cependant, cette décision impliquerait que les 2 pays partagent des informations jusqu’ici hautement classifiées sur leurs programmes nucléaires respectifs.

“Le fait est que, une fois que vous avez commencé à travailler sur des choses comme la simulation d’explosions nucléaires, vous commencez à partager beaucoup de secrets,” déclaré un spécialiste de la défense.

Un autre explique : “Au final, cela pourrait signifier qu’il devrait y avoir un successeur différent du missile américain Trident en Grande-Bretagne.”

Si la collaboration sur la maintenance des têtes nucléaires est acceptée, cela serait un instant d’une importance énorme. Cela sera cependant politiquement difficile. La décision d’aller de l’avant sur une participation commune sur la simulation ferait des vagues en de nombreux endroits.

Même si les responsables américains pourraient voir cet accord d’un bon œil, acceptant que de nos jours il vaut mieux que les Européens travaillent ensemble sur la défense, cela pourrait être remis en cause par les Républicains au Congrès. Des politiciens, situés à droite des échiquiers politiques français et britanniques, pourraient aussi commencer à se sentir mal à l’aise à ce sujet.

Source : Financial Times (Grande-Bretagne)