Les nouveaux arsenaux de DCNS

  • Dernière mise à jour le 10 novembre 2009.

Depuis 2003, la Direction des Constructions Navales est devenue une entreprise de droit privé, supprimant au passage son statut d’administration. En renommant l’entreprise DCNS, la transformation est symboliquement achevée.

Dans les faits, cette "privatisation" va permettre de nouvelles possibilités qui n’étaient pas imaginables (en exagérant un peu tout de même) pour une administration : le développement international (au delà de la simple vente). A travers le prisme des programmes FREMM, Scorpène et bientôt BPC, l’ex-DCN dispose de solides produits mais pour certains clients, l’entreprise est allé plus loins.

La fusion des activités navales de Thalès (Thalès Navale France) avec DCN a aboutit à la constitution d’un champion naval français. Et d’un changement de culture à la clef au sein de la nouvelle DCN : la stratégie multidomestique, héritée en droite ligne de Thalès.

 Asie du sud

A Singapour, la vente des 6 frégates dérivés des LaFayette a été suivit par l’établissement d’un bureau en 2002, transformé en filiale en 2005 sous le nom de "DCNS Far East Services". Le but avoué est la conquête des services de MCO dans cette partie du monde.

En Inde la vente de 6 Scorpène s’est accompagné d’un transfert de technologie au chantier indien de Mazgaon Docks Ltd. Il est à noter que DCNS transfert seulement la technologie, même si la constitution d’une filiale, DCNS India, dans le pays indique la volonté du groupe de s’implanter pour de nouveaux programmes. La construction local des sous-marins s’accompagne de perspective nouvelle pour des BPC et de nouveaux Scorpène.

il est légitime de se demander s’il peut exister un lien industriel entre la filiale de DCNS en Inde et à Singapour. L’intérêt d’une coopération se pose, la clarification de la stratégie du groupe dans cette partie du monde s’impose. La possibilité que la Malaisie soit intéressé par un BPC, entre concurrent, après l’incendie de son navire amphibie ne fait que remettre d’actualité un peu plus les deux filiales dans cette partie du monde.

 Amérique latine

Au Brésil, la vente de 4 sous-marins Scorpène et de la coque d’un "Scorpène nucléaire" a été signé le 23 décembre 2008. Ce contrat a vu la signature d’un ambitieux accord de défense avec le Brésil. La partie industrielle navale a aboutit à la constitution de la co-entreprise Itaguaï Construções Navais avec le brésilien Odebrecht, ce qui augure bien d’un arsenal brésilien. Les perspectives généreuses envisageable suite à l’ambition de la marine brésilienne présagent d’autres fructueux contrats (le nombre de SNA relevés de 1 à 3, de nouveaux bâtiments amphibie, de nouvelles frégates... De nouveaux porte-avions).

Au Chili, la vente de 2 Scorpène ne laissait pas présager un quelconque montage industriel puisque les deux navires étaient réalisés entre la France et l’Espagne. Cependant, la tournée sud-américaine du ministre de la défense Hervé Morin ce 29 octobre a révélé la volonté d’un accord de défense semblable à celui signé avec le Brésil mais dans une autre "dimension". La volonté du Chili de renouveler bâtiments amphibies et patrouilleurs permet d’imaginer un partenariat industriel nouveau entre l’entreprise de navale militaire ASMAR chilienne et le français DCNS.

Il se pose la même question en Amérique latine qu’en Asie. L’implantation de DCNS au Chili et au Brésil pose la question d’une éventuelle coopération entre les deux groupes. Les autres coopérations et participations croisées dans d’autres industrie militaire oblige même à évoquer des entreprises transnationales. Dans lequel cas, DCNS aurait une participation. Le Brésil et le Chili semble avoir une ligne assez proche sur la volonté d’émancipation de l’Amérique du sud vis-à-vis de Washington. Ce qui plaiderait pour la constitution de groupes industrielles communs à l’image de ce qui se passe en Europe depuis une cinquantaine d’année...
Mais il reste un absent, ou une absence, la position de l’Argentine qui est passé de la concurrence dangereuse d’avec le Brésil dans les années 70 à un dialogue fructueux pour émanciper l’Amérique latine. Il serait intéressant de savoir quelles seront les ambitions militaires dans les années à venir pour ce pays, malgré les crises. Et quelle sera la capacité d’influence française dans ce domaine ci.

 Europe du Nord

En Pologne, la volonté de modernisation de la marine laisse entrevoir la réalisation de bâtiments amphibie, de frégates et de sous-marins. On prête à DCNS la volonté d’investir dans le chantier de Gdynia, contre l’achat de 2 Scorpène par la marine polonaise. Il est probable que ce lourd investissement soit accompagné d’un solide ancrage dans le marché naval nord-européen. Cette possible et futur filiale "DCNS Pologne" appelle un plan de charge plus soutenu que la modernisation de la marine polonaise.

Néanmoins, l’Europe du nord est déjà bien investit par Thalès et on y voit une concentration des européens œuvrant dans la navale militaire : les allemands, les suédois, les Pays-Bas et l’Espagne par l’entremise de la Norvège. A la différence d’autres parties du monde le défi est d’autant plus compliqué. Et l’information annoncé par Professional Defense que ThyssenKrupp, en plus de revendre ses chantiers civils, pourrait revendre ses chantiers militaires, a jeté un trouble. Le rapprochement naval franco-allemand est dans les cartons depuis peut être deux décennies. L’échec relatif de la gouvernance d’EADS a très certainement jeté un froid. Alors l’hypothèse d’un rachat pur et simple de l’industriel allemand par le français semblait inimaginable.

La vente d’un BPC à la Russie avec la construction sous-licence de 4 navires dans ce pays laisse présager encore une fois la constitution d’une filiale dans ce pays pour accompagner le possible contrat. Les rumeurs, déclarations, bruits de couloir et analyses sur le sujet évoquent depuis d’un à deux ans la possible vente de BPC. Mais aussi d’une coopération sur le programme de porte-avions russe. Cependant, il est peu fait état du renouvellement de l’ossature de la marine russe : corvettes, frégates et destroyer. Ce sont des programmes qui n’ont pas dépasser le stade de la construction du prototype.

Et encore mieux, personne encore n’a semble-t-il évoquer la possible interaction entre : une relation stratégique forte entre la Russie et la France, la possible vente de BPC à la Russie et l’échec jusqu’à aujourd’hui du programme Boulava russe. DCNS pourrait-t-elle servir de tremplin à d’autre ?

La volonté d’un traité sur un espace européen de sécurité commune étendu à la russie donnerait un cadre.

 Bassin méditerranéen

En Grèce les négociations durent depuis plusieurs années pour la construction en transfert de technologie de 6 frégates FREMM en version anti-aérienne. Mais la déconvenue de TKMS dans ce pays avec le contrat des sous-marins type 214 laisse planer quelques doutes. Ce pourrait être sur la solvabilité de l’Etat grec ou sur une possible guerre larvé entre DCNS et TKMS dans ce pays dont le fait d’arme serait l’échec de ce contrat. Cette hypothèse est à relier avec l’agressive et souvent mensongère campagne de presse que DCNS a subit au Brésil sur le programme Scorpène.

En Algérie le contrat de 4 à 6 frégates, selon les sources, rend impératif la réalisation en transfert de technologie de ces futurs navires. Le chantier local algérien serait à moderniser. On peut d’ores et déjà présager de la constitution, encore une fois, d’une filiale DCNS en Algérie. Si jamais le contrat était remporté par le français, bien que les deux pays soit en période de froid diplomatique.

Avec des FREMM réalisées en transfert de technologie pour la Grèce et l’Algérie, est-ce que ces constructions locales ont un avenir ? Il est n’est pas si difficile de construire des frégates dans ces pays, mais les investissements réalisés dans ces pays appellent des perspectives de long terme. En ce qui concerne le contrat algérien, il pourrait constituer un tremplin pour le prospect de FREMM saoudienne, et par extension, de certains prospects français au moyen-orient. La construction grecque pourrait-elle structurer la relation avec les chantiers bulgares ?

L'analyse de la rédaction :

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