USS Hampton : dissimulation d’erreurs liées àla sécurité

  • Dernière mise à jour le 22 octobre 2007.

Des atomiciens embarqués sur le sous-marin USS Hampton ont été punis pour du laxisme dans le respect des procédures de sécurité et pour avoir falsifié les cahiers d’historique pour cacher leurs erreurs, selon des sources proches de l’enquête en cours.

Ces accusations provoquent déjà des vagues dans toute la communauté nucléaire étroitement soudée de l’US Navy, qui s’enorgueuillit de sa dévotion aux règles et aux réglements de sécurité nucléaire.

Pour l’instant, un officier et 5 officiers-mariniers ont reçu des sanctions extra-judiciaires à la suite d’une enquête préliminaire, mais une enquête plus large, dans le cadre du manuel du Judge Advocate General est actuellement en cours, a déclaré le Lt. Alli Myrick, porte-parole de la 11è escadrille de sous-marins, dont fait partie le Hampton.

La nature des sanctions n’a pas été rendue publique, mais les 6 ont été réaffectés à l’escadrille, a-t-elle indiqué.

Le sous-marin Hampton
Le sous-marin Hampton est arrivé le 17 septembre àla base navale de Point Loma (Californie), après une mission dans le Pacifique Ouest. © Kristina Brockman

Le Hampton a terminé le 17 septembre une mission outre-mer. Les violations ont été découvertes lors du transit du sous-marin vers la base navale de Point Loma (Californie), son nouveau port-base. Il n’a pas bougé depuis son accostage.

“Pour l’instant, il ne quitte pas le quai, il n’appareillera pas,” a déclaré Myrick.

Le commandant du Hampton, le Cmdr. Mike Portland, était toujours à son poste le 19 octobre, a indiqué Myrick. Le commandant en second, le Lt. Cmdr. Chad Hennings, et le patron du pont, le maître principal manoeuvrier Tim Baisley, étaient toujours affectés à bord du sous-marin, a-t-elle précisé.

Des responsables de la Navy ont refusé de discuter de l’enquête parce qu’elle n’était pas terminée. Elle a été ordonnée par le commandant de l’escadrille, le Capt. Chip Jaenichen, après que des “problèmes” soient apparus alors que le sous-marin et l’escadrille préparaient l’examen normal de fin de mission, a expliqué Myrick.

“Au cours d’un examen de routine ... le respect des procédures [par l’équipage], bien que ne mettant pas la sécurité en jeu, a été jugé inférieur aux standards élevés de la Navy,” ont indiqué de hauts responsables de la 11è escadrille dans un communiqué que Myrick a fourni à Navy Times.

Ces “standards” concerne généralement les opérations, la conservation des historiques, l’entraînement et les qualifications, a-t-elle précisé.

Une fois que l’enquête sera terminée, il est possible que d’autres membres de l’équpage soient impliqués et que d’autres sanctions soient ordonnées. Myrick a refusé de spéculer.

Le Cmdr. Jeff Davis, un porte-parole de la Navy au Pentagone, a déclaré que les marins impliqués “étaient clairement en dessous des standards rigoureux que nous avons mis en place. Mais jamais, en aucune manière, cela a-t-il conduit à une situation non-sûre.”

Selon une source ayant connaissance de l’enquête, le problème principal concerne la périodicité avec laquelle les marins analysaient les propriétés chimiques et radiologiques du réacteur du sous-marin, qui sont normalement vérifiées chaque jour.

Pendant la préparation du Operational Reactor Safeguard Examination [1], qui est effectuée lors de chaque retour de mission d’un sous-marin nucléaire, des responsables ont découvert que les marins n’avaient pas contrôlé l’eau pendant au mois un mois, et leur officier chef de service, l’assistant des contrôles chimiques et radiologiques (CRA), le savait, a indiqué la source.

Ils ont aussi appris que les historiques avaient été falsifiés plus tard pour dissimuler la défaillance et faire comme si les marins avaient effectué toutes les vérifications exigées.

Ne pas effectuer les vérifications chimiques nécessaires pourrait conduire à long terme à de la corrosion dans le système, a expliqué la source. “La raison pour laquelle on maintient la chimie de l’eau entre certains paramètres, c’est pour éviter la corrosion. Mais nous mesurons aussi les niveaux de radioactivité générale de l’eau pour être sûrs que [les éléments combustiques du] réasteur sont intacts.”

Un commandant de sous-marin en retraite a décrit de cette manière le processus rigoureux :

“Lorsque l’échantillon est prélevé et analysé, il est vérifié par les hommes de quart de la propulsion afin qu’ils puissent prendre toutes les mesures que l’échantillon indique. C’est le premier échelon. Deuxièmement, ils sont entièrement contrôlés par la chaîne de commandement du navire — le technicien en chef du laboratoire (ELT), le CRA et l’ingénieur. Tous vérifient ça régulièrement — chaque jour, chaque semaine et chaque mois. Et le commandant et le second les contrôlent aussi régulièrement.

“C’est dans la chaîne de commandement du sous-marin. Le troisième échelon est la surveillance extérieure et les équipes d’inspection, l’escadrille et [Réacteurs Navals] qui envoyent des contrôleurs sur le sous-marin n’importe quand. Ces types ne vous préviennent pas ; ils vous réveillent seulement à 2 heures du matin pour vous prévenir qu’ils sont déjà à bord. Avoir vos niveaux de chimie hors de la norme est un bon moyen d’avoir des problèmes.”

Que ce processus ait été apparemment complètement ignoré a choqué l’ancien commandant.

“Je suis indigné,” a-t-il indiqué. “C’est incroyable dans le sens complet du terme, je ne peux pas le croire. Le système, par conception et par son utilisation, est conçu de manière fermée et surveillé de très près par des personnes pour s’assurer que tout est fait correctement dès la première fois.”

Faisant référence aux niveaux chimiques, un autre commandant de sous-marin a ajouté : “Ce n’est pas que c’est dangereux sur le moment. Oublier une analyse chimique un jour n’est pas ce qui est dangereux, mais la philisophie opérationnelle adoptée par des gens qui feraient ça, si elle était appliquée aux autres aspects de la conduite du réacteur nucléaire ou à d’autres aspects du sous-marin, pourrait être dangereuse. C’est ça qui est effrayant. En plus, pourquoi diable ne vérifieriez-vous pas les niveaux chimiques ? D’abord, c’est le boulot de l’ELT et du CRA. Ensuite, cela prend environ une heure et demie chaque jour. Enfin, vous êtes à bord d’un sous-marin, ce n’est pas comme si vous pouviez partir avec rien à faire pendant votre temps libre.”

Bien qu’il n’y ait aucune preuve à ce moment de l’enquête que le problème dépasse le Hampton, la source familière avec l’enquête a indiqué que cela allait déclencher des vérifications complémentaires dans toute la communauté. “Parce qu’une fois que vous avez découvert le problème quelque part, vous devez supposer qu’il existe ailleurs.”

Davis a déclaré que, bien que l’enquête soit toujours en cours, “nous n’avons absolument aucune raison de croire que c’est un problème qui touche toute la flotte.”

Lorsqu’on lui a demandé la motivation des marins, la source a répondu que c’était probablement “la paresse.”

L’inquiétude est remontée jusqu’à l’amiral Kirkland Donald, directeur des Réacteurs Nucléaires, a indiqué la source. “Ils savent ce qui c’est passé et qui est impliqué,” a-t-il déclaré.

La discussion a déjà commencé sur les blogs concernant les sous-marins.

“Nous avons tous entendu parlé de ce qui c’est passé et c’est assez mauvais. Cela va avoir un effet de ricochet qui va toucher tout le monde. Préparez-vous si vous savez ce que je veux dire. J’ai déjà eu mon travail contrôlé 2 fois ce mois-ci,” écrit un contributeur anonyme sur le blog The Stupid shall be punished [2].

Portland a pris le commandement du sous-marin le 3 aout 2005. Très récemment, le sous-marin a passé 7 mois en mission, pendant lesquels il a participé à 2 exercices importants et à une mission “émergente” dans la zone de la 7ème flotte. “Emergente” signifie généralement non plannifiée. A la fin de la mission, le sous-marin a officiellement rejoint son nouveau port-base de Point Loma à la place de Norfolk (Virginie).

Cette année, 10 commandants de différents types d’unités ont été démis de leurs fonctions pour différentes raisons, certains pour des accidents, d’autres pour des manques de jugement ou l’atmosphère régnant dans leur unité.

Notes :

[1Examen de garantie d’un réacteur opérationnel.

[2Le stupide sera puni.

Source : NavyTimes (Etats-Unis)