L’US Navy pourrait-elle abandonner son projet SSBN(X) de SNLE futur ?

  • Dernière mise à jour le 23 juillet 2011.

Dans certaines officines de Washington, une prophétie revient aussi régulièrement que les croyances maya dans une fin du monde en 2012 : dans un avenir pas très éloigné, le projet de sous-marin nucléaire lanceur d’engins de nouvelle génération de l’US Navy, le SSBN(X), va devenir tellement couteux qu’il va utiliser presque chaque dollar que la Navy dépensera en bâtiments neufs. Un sous-marin nucléaire est l’équipement le plus compliqué jamais construit, plus sophistiqué qu’une navette spatiale, et en construire une nouvelle génération en repartant de zéro pourrait couter 70 milliards $ au plus, presque certainement plus.

Mais, si l’US Navy essayait de modifier les SNA type Virginia pour emporter des missiles stratégiques, certains pensent que cela permettrait d’économiser beaucoup d’argent. Cette idée a été lancée il y a des années, et les amiraux de l’US Navy ne l’aiment pas — les Virginia n’ont pas été conçus pour cette mission, cela nécessiterait une version différente, plus petite du missile que les SNLE Ohio actuels transportent, et construire un nouveau SNLE en partant de zéro assure qu’aucun compromis ne l’empêchera d’accomplir discrètement ses patrouilles pendant des décennies. L’US Navy déteste tellement cette idée, en fait, que vous pourriez être pardonné si vous croyez que l’idée du Virginia transformé en SNLE était morte. Le Defense Acquisition Board a même donné l’an dernier son feu vert au projet SSBN(X).

Cependant, il semble que cette idée ait survécu. Le général des Marines James Cartwright, le vice-président quittant du Comité des Chefs d’état-major, l’a abordée la semaine dernière devant des journalistes, ce qui a déclenché un tir de barrages parmi les constructeurs de sous-marins dans le Connecticut, siège du chantier naval Electric Boat.

Voici comment la journaliste Jennifer McDermott du journal The Day le rapporte :

[Le général Cartwright] a déclaré la semaine dernière devant des journalistes à Washington que « tout était envisageable » alors que le Pentagone cherche à supprimer au moins 400 milliards $ du budget de la défense jusqu’en 2023.

Au lieu de construire le nouveau SNLE, a déclaré Cartwright, la Navy pourrait allonger les SNA de la classe Virginia afin qu’ils puissent embarquer des missiles balistiques.

Le porte-parole d’Electric Boat, Robert Hamilton, a indiqué qu’il ne pouvait faire aucun commentaire sur le sujet.

Le représentant du Connecticut, Joe Courtney, le Démocrate dont la circonscription abrite le chantier Electric Boat et qui est un soutien puissant des sous-marins au sein du Comité des Forces Armées de la Chambre des Représentants, a déclaré à McDermott que son comité avait étudié la proposition d’allonger les Virginia et l’avait rejeté — en achetant plusieurs types de missiles balistiques pour les inclure dans un sous-marin plus petit, on ne fait pas véritablement d’économie sur le projet SSBN(X), explique-t-il.

C’est faux, argumente le plus célèbre spécialiste naval d’Amérique :

Norman Polmar, expert naval et spécialiste de la guerre sous-marine, a expliqué qu’il militait depuis des années pour un sous-marin plus petit, basé sur la classe Virginia, parce que le projet SSBN(X), dont il pense qu’il pourrait ajouter jusqu’à 100 milliards $ aux couts de recherche, de développement et de construction, est tout simplement inabordable.

La classe Virginia pourrait être agrandie pour ajouter un compartiment missile afin que le sous-marin puisse emporter près d’une douzaine de missiles plus petits, pour un montant de 3 à 3,5 milliards $ pour chaque sous-marin modifié, indique Polmar, qui a été conseiller de plusieurs hauts responsables de l’US Navy.

Il explique que, pour réduire le cout du projet SSBN(X), l’US Navy devrait accepter des compromis sur de trop nombreuses caractéristiques. La meilleure solution est de construire un SNA modifié, jusqu’à ce que la Navy puisse se payer un véritable SNLE, explique Polmar.

Il est difficile de savoir ce qu’il en est exactement. Si la Navy considère que les jeux sont faits, pourquoi le vice-président proposerait-il une stratégie alternative sur ce projet ? La règle n° 1 à Washington est qu’aucune décision n’est jamais définitive, donc ce pourrait ne pas être la dernière fois que nous entendons parler de cette proposition.

Source : Dod Buzz (Etats-Unis)