Une nouvelle torpille pour les sous-marins français

  • Dernière mise à jour le 3 février 2011.

Les torpilles sont des armes puissantes, même si elles sont rarement utilisées. Si on excepte l’attaque d’un bâtiment sud-coréen en mars dernier par la Corée du Nord, la dernière torpille utilisée au combat l’a été par la Royal Navy au cours de la guerre des Malouines, “et ils ont utilisé une torpille de la 2è Guerre Mondiale,” indique Marc Le Roy, directeur de la division ASM (Armes Sous Marines) de DCNS.

Quoi qu’il en soit, la France investit dans le développement d’une nouvelle génération de torpille lourde, la F21, qui sera l’arme principale de ses sous-marins nucléaires pour les 30 à 40 prochaines années. “La France est le dernier pays à développer une nouvelle torpille lourde,” explique Le Roy. L’Allemagne et les Etats-Unis, ajoute-t-il, “ont apporté des améliorations à des torpilles existantes, là où, pour la F21, nous développons un produit entièrement noueau.”

La F21 devrait entrer en service en 2016. DCNS prévoit de fabriquer 100 torpilles pour les sous-marins des classes Rubis, Barracuda et Le Triomphant. “Parce que ces torpilles sont conçues pour faire partie du système d’armes de sous-marins nucléaires, elles doivent être extrêmement sûres,” indique Le Roy. Il doit y avoir un risque zéro de lancement ou d’explosion accidentelle. DCNS a développé un composant important pour la sécurité : un module énergétique basé sur une pile aluminium / oxyde d’argent qui a besoin d’eau de mer pour s’activer — quelque chose qu’il est improbable de trouver à bord d’un sous-marin.

Pour répondre aux exigences de sécurité des sous-marins, la F21 sera lancée par un piston hors du tube lance-torpille, après quoi une soupape s’ouvre et laisse entrer l’eau de mer dans la pile afin de l’activer. La pile “fournit une grande puissance électrique et c’est le système le plus performant sur le marché.”

La pile est suffisamment compacte pour que les dimensions de la torpille F21 — 6 mètres de long et 533 mm de diamètre — soient compatibles avec les tubes lance-torpilles existants. Le problème avec les torpilles compétitives, qui sont équipées de piles d’ancienne génération, c’est que pour obtenir l’énergie dont elles ont besoin pour avancer et faire fonctionner les contre-mesures, elles “ont besoin de piles dont les dimensions sont telles que la torpille n’entre plus dans le tube,” explique Le Roy. Il faut aussi que, lorsque la torpille atteint sa cible, il lui reste assez d’énergie pour l’attaquer et la couler. “Nous parlons ici de cibles à forte valeur, comme des porte-avions et des frégates,” ajoute-t-il.

Ceci explique l’importance de la pile principale comme source d’énergie. la Grande-Bretagne, la Russie, les Etats-Unis et la Suède, ont retenu des systèmes thermique comme source d’énergie. La France a choisi ce système électrique “parce qu’il est sûr et silencieux,” indique Loïc Beaurepaire, responsable du développement et du marketing. “Dans les missions sous-marines, le silence est de la plus grande importance pour éviter toute détection par l’ennemi,” souligne-t-il. “Ce système permet une attaque entièrement silencieuse.”

La F21 est numérique et peut opérer à des profondeurs de 15 à 500 m, ce qui signifie qu’elle peut être utilisée pour des opérations côtières ou en haute-mer. Beaurepaire explique que, dans les eaux peu profondes, il y a des sons “parasites” qui perturbent les torpilles, qui se dirigent vers leur cible grâce aux sons. “Nous traitons numériquement le signal sonore avec les mêmes traitements que dans les sonars modernes, ce qui nous permet de dépasser en grande partie cette difficulté.”

La nouvelle torpille pèse 1,2 tonne, a une portée de 50 km, une vitesse de 50 nœuds et une autonomie d’une heure. Elle peut attaque plusieurs cibles et est guidée par une fibre optique. Selon DCNS, elle est immunisée contre la plupart des contre-mesures.

La charge militaire est composée de PBX B2211, un explosif puissant mais stable qui respecte les standards de l’OTAN (Stanag 4439) et français (Munitions à Risques Atténués). La torpille utilise un système de détonation entièrement électrique (“fuse-and-slapper”). D’abord utilisé dans les missiles, le système slapper, basé sur du plasma, est plus stable et sûr que les systèmes électro-mécaniques classiques, utilisés dans la plupart des torpilles.

La configuration de la torpille peut être modifiée comme torpille d’exercice, indique Beaurepaire. “Nous remplaçons simplement la section explosive par une section d’exercice. Nous pouvons aussi changer la pile principale pour installer une batterie lithium-ion, qui est réutilisable de très nombreuses fois.”

Source : Aviation Week (Etats-Unis)