Impact de la crise économique sur la marine nationale

  • Dernière mise à jour le 11 mars 2010.

La crise économique mondiale a eu un impact sur virtuellement tout le monde. Le magazine américain Proceedings a interrogé les commandants des marines mondiales : La crise a évidemment affecté les Etats-Unis et sa marine. Comment affecte-t-elle la stratégie maritime de votre marine, ses opérations et sa structure de force ? Voici la réponse faite par l’amiral Pierre-François Forissier, chef d’état-major de la marine.

La crise impose de définir des priorités qui conduisent inévitablement à des choix budgétaires et, pour la défense française, à des choix opérationnels et capacitaires.

Pour la marine nationale, les processus décisionnels permettent de hiérarchiser périodiquement les priorités et de faire valoir différentes visions de court, moyen et long termes. Pour les moyens militaires, il s’agit effectivement d’apprécier ce que nous voulons sacrifier et ce que nous voulons conserver.

En France, contrairement à certains gouvernements occidentaux, le choix a été fait de préserver le budget de la défense. Il est donc difficile de considérer que la crise affecte le format ou l’équipement de la marine. L’enveloppe budgétaire prévue par notre Livre Blanc et la Loi de programmation militaire reste donc, pour le moment, inchangée et la marine a pu bénéficier du plan de relance avec, notamment, la construction d’un troisième Bâtiment de Projection et de Commandement. Il sera cependant certainement nécessaire de recourir à des mesures de financement innovantes. Nous y réfléchissons pour certains de nos équipements.

Mais si cette posture a pu être tenue, c’est aussi parce que des choix avaient déjà été faits, au regard de contraintes budgétaire fortes. C’est en particulier le cas pour la décision de construction d’un second porte-avions qui avait été reportée à 2011.

En effet, bien avant la crise, la conjoncture a nécessité la définition d’un nouveau format pour les armées, la remise en question de certains programmes d’armement majeurs et la modification profonde de notre outil de défense. Le retard de certains programmes pouvant affecter de façon transitoire nos capacités, il était difficile d’accentuer un processus qui, pour notre marine, aurait conduit à remettre profondément en cause sa cohérence opérationnelle, alors que ses moyens ne cessent d’être sollicités.

L’analyse de la crise a montré qu’il était nécessaire de penser l’action de l’Etat sur le long terme. D’ores et déjà, nos gouvernements prennent conscience des enjeux stratégiques maritimes liés à la mondialisation, à l’accentuation des déséquilibres mais aussi aux risques environnementaux ou climatiques. Pouvoir anticiper et prévenir est finalement moins onéreux que d’intervenir dans la durée. Pour la marine, cela se traduit par la capacité d’adopter une posture navale capable de monter rapidement en puissance, qui puisse être cohérente avec notre connaissance du milieu maritime et notre souci de prévenir les crises sur l’ensemble des théâtres où notre présence est requise.

La crise renforce le caractère incertain et instable de notre monde. La marine nationale contribue à apporter à la France une capacité d’action compatible avec ses ambitions en matière de défense, comme de politique étrangère.

Amiral Pierre-François FORISSIER

Chef d’état-major de la marine

L'analyse de la rédaction :

Langue de première publication : anglais. Traduction : Gilles Corlobé

Source : Proceedings (Etats-Unis)