Déminage maritime : l’expérience des hommes est ce qui compte

  • Dernière mise à jour le 17 septembre 2008.

Pourquoi les Français sont-ils reconnus dans le monde comme les plus grands spécialistes de la lutte contre les mines ? Luc Cahier-Bihoreau, responsable du développement de l’unité de la lutte contre les mines chez Thales Under Water Systems et le capitaine de corvette Mathieu Cherriere, commandant du chasseur de mines Verseau reconnaissent que ce n’est pas tant les technologies dont ils disposent que l’expérience accumulée des plongeurs-démineurs de la marine nationale.

“Les plongeurs-démineurs sont comme les ’oreilles d’or’ à bord des sous-marins : aucune technologie ne peut remplacer l’expérience et, lorsque vous avez quelqu’un qui a passé 10, 15 ou même 20 comme plongeur-démineur, il a appris à reconnaître chaque ombre pour ce qu’elle est : une huitre ou une mine,” m’explique Luc Cahier-Bihoreau à bord du Verseau. Dans d’autres marins, les personnels chargés du déminage ne restent généralement pas aussi longtemps “et lorsqu’ils partent pour une autre fonction, ils emportent leur expérience avec eux et quelqu’un d’autre doit tout apprendre depuis le début,” poursuit-il.

Thales Underwater Systems gagne 70 millions € par an, dont 80% à l’exportation : “La réputation de la France s’est faite après la première Guerre du Golfe, lorsque les marines alliées ont nettoyé le Golfe de 1.200 mines, dont la majeure partie a été trouvée par la France. Donc, quand par exemple le Pakistan a cherché à acheter des systèmes de déminage, ils ont seulement regardé combien chacun avait trouvé de mines dans le Golfe et sont allés vers le vainqueur,” a-t-il indiqué.

Je dois reconnaître que je ne connaissais rien au déminage maritime avant ma visite à bord du Verseau : pour notre montrer à quel point les ombres sont importantes, on nous a montré un écran de ce qui semblaient être des échos sur un fond gris. En ajoutant les ombres, on voyait que les échos étaient des chameaux dans le désert et, comme l’a dit Cahier-Bihoreau, “le plus petit écho que vous pourriez avoir laissé de côté se révèle maintenant le plus dangereux parce nous voyons maintenant que c’est un homme avec un fusil.” Évidemment, cette image n’était pas sous-marine mais elle illustre parfaitement l’importance des ombres.

Tout le monde est d’accord, m’a-t-il dit, que l’avenir de la lutte contre les mines repose dans “une utilisation intensive des drones, mais il y a un gros problème dans leur doctrine d’emploi ; aucune marine n’a vraiment décidé comment nous allons les utiliser.” L’idée est de sortir l’homme de la boucle, pas pour l’interprétation des échos du sonar mais pour les phases de vérification et de destruction.

Le Colonel Jean-Yves Bruxelle de la DGA nous a déclaré que les matériels actuels de lutte contre les mines seraient obsolètes d’ici 20 ans. “Donc, nous préparons actuellement l’avenir et notre objectif est de développer un concept modulaire utilisant à grande échelle des robots pouvant être embarqués sur des navires spécialisés ou non.” Parce que les chasseurs de mines ne peuvent faire que cela... Le Verseau a été construit en 1987 pour la marine belge. Mais il a été transféré à la marine nationale en 1997 parce que les Belges ne pouvaient plus se permettre de le garder...

Par Christina Mackenzie

Source : Aviation Week (Etats-Unis)