Le commandant des forces sous-marines américaines milite pour un meilleur repos des équipages

  • Dernière mise à jour le 3 novembre 2014.

Le commandant des forces sous-marines américaines explique que donner aux équipages de sous-marins le sommeil dont ils ont besoin est un changement culturel nécessaire, là où le sommeil a longtemps été considéré comme un luxe.

« De nombreuses études montent qu’on travaille mieux si on peut dormir suffisamment et si on dort tous les jours à la même heure, » a déclaré le vice-amiral Michael Connor, commandant des forces sous-marines américaines. « C’est assez simple, et c’est pourtant un fait généralement ignoré dans toute l’histoire des sous-marins nucléaires. »

L’amiral Connor s’est exprimé le 23 octobre dernier lors de la conférence annuelle de la Naval Submarine League, devant un parterre de centaines de sous-mariniers, de retraités et d’industriels. Il a déclaré « ne pas vouloir être dirigiste, » mais a ajouté qu’il fera désormais passer aux commandants de sous-marin le message : « les marins doivent dormir suffisamment. » Avoir un sommeil adéquat est une exigence pour que les aviateurs puissent voler. La fatigue est souvent citée comme un facteur aggravant lors des accidents, comme dans la collision survenue en 2012 entre le croiseur San Jacinto et le sous-marin Montpelier.

« Il est important de dire aux commandants de sous-marins que la mesure du succès n’est pas que tout l’équipage du sous-marin travaille aussi dur qu’il le peut jusqu’à l’épuisement, » a déclaré l’amiral Connor. « Ce doit être qu’il travaille assez dur pour apprendre son métier — pour être efficace — mais il faut tout de même leur donner assez de temps pour penser et se reposer. Et peut-être même leur donner assez de temps pour réfléchir à la façon dont ils pourraient améliorer l’efficacité du sous-marin. »

« Cela semble simple à dire, mais ceux d’entre vous qui avez navigué, savent que certains membres d’équipage ne sont satisfaits que s’ils ont travaillé jusqu’à complet épuisement. Nous oublions cela une fois que nous quittons les sous-marins, mais nombre d’entre vous étaient fatigués en permanence, entre 22 et 42 ans, n’est-ce pas vrai ?, » a poursuivi l’amiral Connor, un ancien commandant du sous-marin Seawolf.

Parmi les évolutions essayées : les quarts de 8 heures. Ils durent 2 heures de plus que le cycle habituel de 6 heures mais ils ont l’avantage de permettre aux marins de dormir la même durée pendant chaque cycle de 24 heures.

« Il est important, » souligne l’amiral, « de dire que le repos de l’équipage est une priorité et de laisser les commandants de sous-marin régler les choses à leur façon. »

« Ceci est nouveau pour beaucoup de gens, ce n’est pas ce qu’ils ont fait pendant toute leur carrière, » a-t-il ajouté. « Nous ne pouvons pas donner une solution clé en mains, unique, mais nous voulons qu’ils adoptent les principes. »

L’amiral Connor indique que, jusqu’à présent, les sous-marins ont bien réagi. Il a remarqué un sous-marin qui avait testé les quarts de 8 heures, mais dont le quart du matin s’est fatigué de prendre le petit-déjeuner avant le quart. « La solution qu’ils ont trouvé — et je n’y aurais jamais pensé — : les quarts restent les mêmes mais les repas changent. Donc, nous leur laissons régler les détails. »

Au cours des derniers mois, la force sous-marine a fait du sommeil des équipages une “haute priorité”. Il y a des signes que la flotte de surface pourrait suivre le même chemin, bien que le manque de personnel et la culture du “travail jusqu’à l’épuisement” restent des obstacles.

Le Dr. Nita Shattuck, un des principaux experts de la Navy sur la fatigue et les performances des équipages, explique que, parfois, lutter contre la fatigue signifie lutter contre l’encadrement.

« Il y a des officiers et des officiers-mariniers qui, soit n’encouragent pas, soit même interdisent, leurs subordonnés à prendre assez de sommeil, » explique le Dr Shattuck. « Ils pensent : c’était comme cela pour nous, donc c’est comme cela que cela doit être. »

Sur un navire, le Dr Shattuck a découvert que certains officiers-mariniers interdisaient aux marins qui n’obtenaient pas leurs qualifications d’aller se coucher tant qu’ils n’avaient pas étudié.

« C’est totalement contre-productif, » souligne-t-elle. « Si vous manquez de sommeil, vous ne créez pas les bonnes conditions pour retenir ce que vous apprenez. »

Source : Navy Times (Etats-Unis)