Stratégie navale : les dangers des profondeurs

  • Dernière mise à jour le 13 juin 2008.

Pendant plus de 90 ans, le sous-marin a été l’arme stratégique clé pour la guerre en mer. La Grande-Bretagne a été presque forcée à la soumission par les U-boote allemands au cours des 2 guerres mondiales, et le Japon a été effectivement isolé, affamé et battu par les sous-marins américains pendant la 2nde Guerre Mondiale. Par conséquent, pourquoi les marines occidentales du 21è siècle, et leurs responsables politiques, ne consacrent-ils toujours si peu de temps à la lutte anti-sous-marine (ASM) ?

La lutte ASM a été essentielle pour la victoire des Alliés dans chaque Guerre mondiale. Et c’était aussi une question de vie ou de mort pendant les longues décennies de la Guerre Froide. Dans ces années, la menace comportait 2 volets :

D’abord, les sous-marins nucléaires stratégiques soviétiques, les SNLE, armés de missiles balistiques, constituaient la principale menace stratégique contre les Etats-Unis, de la même manière que les SNLE de l’US Navy menaçaient en retour les villes de l’Union Soviétique.

Mais, à coté de cela, il y avait la très nombreuse flotte de sous-marins, la plupart à propulsion nucléaire, qui représentait une menace beaucoup plus formidable pour les communications maritimes de l’Amérique avec ses principaux alliés à travers les océans Atlantique et Pacifique que les vieux et primitifs — même selon les standards de 1940 — U-boats de la Kriegsmarine ne l’a jamais réussi pendant la bataille de l’Atlantique.

Les marines britannique et américaines avaient toutes les 2 commencé la 2nde Guerre mondiale suffisantes et non préparées à un niveau affligeant en ce qui concerne la menace que même la poignée de sous-marins Nazi allait constituer. La seule chose qui a empêché les Alliés de perdre la guerre a été que le Grand Amiral Erich Raeder, le commandant en chef de la marine allemande, était tout aussi préparé. Il manquait du génie, de la vision stratégique et de la concentration disciplinée et impeccable dont faisait preuve l’amiral Karl Doenitz, un commandant de U-boat pendant la 1ère Guerre Mondiale qui commandait la force sous-marine allemande au début de la guerre.

Heureusement pour les Alliés, Adolf Hitler n’a remplacé Raeder par Doenitz qu’en mai 1943. Les Allemands ont accéléré le développement de leurs sous-marins trop tard pour pouvoir gagner la guerre.

Les gouvernements et les commandants des marines américaines et de l’OTAN n’ont pas commis la même erreur pendant la Guerre Froide, pendant laquelle la lutte ASM, les armes et les forces anti-sous-marins ont reçu une sérieuse priorité. Mais dans les années de complaisance qui ont suivi l’effondrement du communisme et la désintégration de l’Union Soviétique à la fin de 1991, l’importance immémoriale de la lutte ASM a été largement oubliée, particulièrement dans l’US Navy. Au début des années 90, l’US Navy a même fermé son bureau chargé de surveiller les technologies sous-marines des autres nations dans le monde.

Désormais, la menace a refait surface, mais d’une manière et dans des endroits inattendus. La grande menace aujourd’hui ne provient pas seulement de sous-marins nucléaires armés de missiles balistiques. Ils représentent toujours une menace, mais ils sont horriblement couteux et technologiquement décourageants. La Chine a connu des problèmes à de nombreuses reprises avec à la fois la construction et les opérations de sa poignée de sous-marins nucléaires et de ses SNLE. Même la Russie a connu de nombreuses difficultés pour l’adaptation du Bulava, la version lancée depuis un sous-marin de son missile balistique intercontinental Topol-M, pour le lancer depuis les tubes plus petits de son tout dernier, SNLE de 4è génération, la classe Boréi, plus petite et par conséquent moins facilement détectable.

Les stratèges navals américains ont suivi de près ces développements. Ils ont cependant été lents à reconnaître que la menace sous-marine réellement sérieuse du 21è siècle allait venir d’une technologie qu’ils avaient abandonné des décennies auparavant, la jugeant obsolète.


Prochaine partie : La montée en puissance des sous-marins diesel

Source : United Press International (Etats-Unis)