Des navires de guerre àlouer

  • Dernière mise à jour le 31 mars 2008.

Dans l’Atlantique Sud, patrouille actuellement le HMS Clyde, un navire loué par VT Group àla Royal Navy. Il est armé de canons de 30 mm. Le navire est chargé de patrouiller en permanence dans la zone entourant les îles Malouines. A bord du bâtiment, un responsable de VT Group assure la liaison entre le propriétaire et son client, la Royal Navy. Si la guerre éclatait àniveau dans cette région disputée avec l’Argentine, VT Group se retrouverait en première ligne.

Bien évidemment, le représentant de VT Group n’a rien d’un commissaire politique de l’Union Soviétique : il ne pourrait pas remettre en cause les décisions du commandant. Mais l’externalisation des opérations militaires menée par le Britanniques — y compris celles sur la ligne de front — soulève des questions similaires. Où se situent les sous-traitants dans la chaîne de commandement ? Et si les armées ne possèdent pas une partie des matériels qu’elles utilisent, leur indépendance — et leur efficacité — n’est-elle pas menacée ?

Jeudi dernier, le ministère britannique a signé le plus gros contrat d’externalisation : pendant 27 ans, EADS va fournir 14 ravitailleurs pour la Royal Air Force. Des pilotes de la RAF feront voler les avions, mais ils appartiendront à EADS et ils seront loués au ministère.

La nature et les coûts de la guerre ont grandement évolués. Aujourd’hui, la guerre est asymétrique (non-conventionnelle) et se déroule de plus en plus dans les coins reculés du globe. Cela signifie que le coût du soutien des forces a fortement augmenté. Selon une analyse d’Ernst & Young, le coût du soutien d’un matériel, comme un char, pendant toute sa vie opérationnelle peut coûter jusqu’à 4 fois son prix d’achat.

Le ministère britannique de la défense reconnait lui-même que les sous-traitants sont souvent plus efficaces pour entretenir et réparer du matériel militaire comme les blindés et les navires, en particulier si c’est eux qui l’ont construit. Des incitations et des pénalités sont prévues selon la performance du sous-traitant. Par exemple, selon le contrat, VT doit faire que les 4 patrouilleurs qu’il loue à la Royal Navy, dont celui de l’Atlantique Sud, soient disponibles 92% du temps. La moyenne pour les autres navires de la Royal Navy atteint péniblement un pâle 64%.

Pour le PDG de VT Group Paul Lester, cela ne fait aucune différence que le patrouilleur — ou tout autre matériel — n’appartienne pas aux armées. “Si le ministère envoie notre matériel au combat et qu’il est endommagé, ils devront payer la réparation”, indique-t-il. “C’est comme louer une voiture.”

Le secteur privé a coopéré avec l’armée pendant des années. Pendant la guerre des Malouines, P&O avait loué le Canberra pour transporter des troupes. Et l’origine de la Royal Navy elle-même repose sur des corsaires comme Sir Francis Drake.

Source : The Gardian (Grande-Bretagne)