La pénurie d’équipage frappe les sous-marins australiens

  • Dernière mise à jour le 10 mars 2008.

La moitié seulement de la flotte sous-marine Australienne peut être envoyée en mer àcause d’un manque critique de sous-mariniers qualifiés.

La crise laisse la Royal Australian Navy avec seulement 3 équipages complets pour ses 6 sous-marins de la classe Collins, diminuant fortement l’efficacité de l’un des plus vitaux et couteux matériels militaires du pays.

"Elle devient une flotte fantôme," a déclaré un sous-marinier, qui souhaite conserver l’anonymat. "Nous perdons nos équipages, on se sent comme à bord de la Marie-Céleste."

The Australian croit savoir que la marine connait actuellement un déficit de 37% dans ses équipages de sous-marins — le plus élevé jamais connu pour sa flotte.

Le déficit a contrait la marine à réduire le nombre de jours de navigation de sa flotte pour la 3è fois en 3 ans.

Le ministre de la défense Joel Fitzgibbon, qui a hérité d’une crise de recrutement dans toute l’armée australienne, a promis que la question sera une priorité première du nouveau gouvernement.

La crise des équipages de sous-marins intervient à un moment où la marine est incapable d’envoyer en mer ses 4 frégates lance-missiles en mer à cause d’une modernisation ratée qui a tout de même couté 1,4 milliard de AUS$ (843 millions €).

La décision prise la semaine dernière par le gouvernement d’annuler l’achat d’hélicoptères Seasprite pour 1 milliard de $ (602 millions €), hélicoptère qui connait de nombreux problèmes de sécurité, laisse les frégates de la classe Anzac de la marine sans un équipement vital destiné à les protéger des navires hostiles et des sous-marins.

Le ministère australien de la défense maintient que, malgré le "déficit significatif" de personnel dans les équipages de sous-marins, il en reste toujours assez pour "assurer les missions opérationnelles" des sous-marins.

Mais le ministère n’indique pas si ces missions ont été réduites à la suite de la pénurie d’équipages.

Des sources du ministère indiquent que l’exode de sous-mariniers — en majorité pour des emplois mieux payés dans le secteur minier en pleine expansion dans l’Australie Occidentale — s’est stabilisé au cours des derniers mois, faisant naitre l’espoir que le pire pourrait être passé.

Cependant, il n’y a aucun signe d’amélioration dans le nombre d’équipages, à un niveau historiquement bas.

La marine a besoin d’environ 45 marins pour armer un sous-marin de la classe Collins, mais environ la moitié doit être des techniciens qualifiés — avec les mêmes compétences recherchées par les très riches compagnies minières.

Bien qu’elle ait offert un large éventail de mesures incitatives pour recruter et retenir les sous-mariniers — y compris une augmentation de salaire plus importante que pour le reste de l’armée — la marine a toujours du mal à retenir ses équipages.

A n’importe quel moment, un ou 2 des 6 sous-marins Collins se trouvent en cale sèche pour des réparations, mais la marine a besoin d’au moins 5 équipages complets pour lui donner la flexibilité dont elle a besoin pour répondre à une crise militaire.

Trois sous-marins — le HMAS Dechaineux, le HMAS Farncomb et le HMAS Sheean — subissent actuellement des réparations, mais, même s’ils étaient prêts à naviguer, il n’y aurait pas d’équipage pour eux.

Des experts du ministère ont averti que la réduction du temps passé en mer signifiera que les équipages auront moins d’expérience opérationnelle et d’entraînement de base dont ils ont besoin.

L’ancien ministre de la défense Kim Beazley, qui était en fonction à la mise en service de la flotte dans les années 80, a indiqué que la marine voudrait au moins 4 équipage et de préférence 6, disponibles à n’importe quel moment.

"Je suis certain que la marine voudrait 4 équipages disponibles à n’importe quel moment et, dans un monde parfait, ils voudraient pouvoir armer de façon adéquate tous les sous-marins," a-t-il déclaré à The Australian.

"Les périodes de bonne santé économique sont toujours difficiles pour le recrutement. L’une des tâches importantes auxquelles le gouvernement devra faire face sera de déterminer comment améliorer le recrutement des sous-mariniers."

La marine a essayé d’attirer les sous-mariniers en augmentant les salaires et les primes, donnant aux sous-mariniers des salaires de départ de plus de 80.000 AUS$ (48.000 €).

Mais le style de vie inhabituel des sous-mariniers fait qu’il est difficile d’attirer les jeunes générations vers le monde du silence.

Les sous-marins de la classe Collins naviguent silencieusement sous la surface, souvent pendant des mois, surveillant et recueillant des renseignements sur des cibles importantes.

Les calendriers de navigation sont “top secret” et les équipages ont interdiction de parler de leur travail avec des personnes extérieures. Les journées sont réparties en 4 quarts de 6 heures, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.

"Le type de personnes que nous recherchons est ce qu’on appelle des introvertis extravertis," indique la marine sur son site. "Des personnes qui ont de bonnes relations avec les autres mais qui, en même temps peuvent occuper leur ’propre espace’, même alors que d’autres les entourent."

The Australian a révélé en décembre dernier que le ministre de la défense Joel Fitzgibbon avait ordonné que la planification commence sur la prochaine génération de sous-marins qui doivent remplacer à l’horizon 2025 les 6 Collins.

Le projet de remplacement d’une durée de 17 ans sera le plus long et le plus couteux projet entreprise en Australie, pouvant couter jusqu’à 25 milliards d’AUS$ (15 milliards €).

Il intervient à un moment où des marines régionales comme celles de l’Indonésie, la Chine et l’Inde cherchent à accroitre leurs flottes sous-marines, ce qui pourrait modifier l’équilibre de la puissance navale.

Source : The Australian (Australie)