Le nouveau missile chinois anti-porte-avions, mythe ou réalité ?

  • Dernière mise à jour le 9 avril 2009.

La presse a révélé la semaine dernière que la Chine avait conçu un missile balistique ayant la capacité d’attaquer des objectifs mobiles.

Selon cette information, diffusée par le Naval Institute américain, il s’agit d’une version modernisée du missile DF-21, destiné à détruire des bâtiments de guerre, et avant tout, des porte-avions.

Si cette information correspond à la réalité, un système pouvant neutraliser la suprématie américaine dans l’aéronavale apparaîtra rapidement dans l’arsenal chinois, une arme dont ont rêvé de nombreuses générations de militaires de nombreux pays.

Il est important de préciser qu’il n’a pas été possible de confirmer l’existence de ce missile, et que la Chine n’est pas le premier pays à chercher à développer une arme spécifiquement destinée à détruire les porte-avions.

Pour l’Union Soviétique, le potentiel militaire de l’aviation embarquée de l’Occident a été un des problèmes les plus aigus depuis la fin de la 2nde Guerre Mondiale, puisque, pendant toute la durée de la Guerre Froide, elle est resté en retard dans ce domaine de l’aviation embarquée.

Pour contre-balancer la menace des porte-avions, Moscou a répliqué en concevant des avions lance-missiles et des sous-marins équipés de missiles anti-navires, mais, face à l’avantage numérique considérable de l’adversaire, ces 2 moyens ne garantissaient le succès, puisqu’ils avaient un rayon d’action limité.

Ainsi, les bombardiers chargés de 2 à 3 missiles ont une autonomie de vol maximale de 2.000 à 2.500 km. Le sous-marin, qui peut atteindre n’importe quel coin de la planète, ne peut poursuivre un porte-avions en transit sans prendre le risque sérieux d’être détecté (et, en temps de guerre, d’être détruit).

De plus, le lancement d’un unique missile ne garantit pas la destruction du porte-avions. Les défenses anti-aériennes des navires d’escorte s’améliorent en permanence, et pour passer ces défenses, il fallait des missiles à chaque fois plus modernes et en quantité chaque fois plus importante.

Pour attaquer un porte-avions et sa flottille, il est indispensable d’avoir une arme pouvant détruire cette forteresse flottante à n’importe quel moment en "un seul coup".

Cette arme ne peut être qu’un missile balistique à ogive nucléaire, pratiquement invulnérable face aux armes de défense anti-aérienne des navires qui existaient il y a quelques années.

L’URSS a fabriqué plusieurs versions de missiles balistiques anti-navires. Le modèle qui fut le plus proche de la mise en service était le missile R-27K, une version modifiée du R-27 (aussi connu comme 4K10, RSM-25 ou SS-N-6, selon la terminologie OTAN), construit par le bureau d’études Makeyev.

Cette version de missile balistique devait transformer les sous-marins nucléaires de deuxième génération (projet 667) en sérieux rivaux des porte-avions, puisque, à cette époque, les systèmes embarqués des porte-avions et des navires d’escorte ne pouvaient pas intercepter une ogive nucléaire.

Cependant, le missile R-27K n’a pas été mis en service parce que les experts russes ont considéré que son efficacité était très limitée.

Un des principales limitations était que la technologie de l’époque ne permettait pas de construire une ogive à guidage autonome fiable, pouvant détecter et atteindre un objectif en mouvement.

Il ne s’agit pas d’une question de précision, la technologie d’alors garantissait que les missiles balistiques avaient une précision inférieur à un km. Compte-tenu de la puissance de la charge nucléaire, c’est plus que suffisant pour détruire un objectif comme un porte-avions et son escorte.

Le problème était que le missile balistique ne pouvait poursuivre un objet en mouvement. Par conséquent, pour contre-balancer le potentiel militaire naval de l’ennemi, l’URSS a choisi les sous-marins nucléaires à missiles de croisière et les avions lance-missiles.

Malgré tout, les possibilités de développer une version de missile balistique anti-navires n’ont pas disparu complètement en Russie. Il est difficile de dire à quel stade se trouvent ces recherches, mais périodiquement, des informations montrant que l’URSS développait une version anti-navires des missiles UR-100 et RT-2PM (Topol) apparaissent.

En ce qui concerne le missile chinois, on ignore jusqu’à quel point la version anti-navire du missile DF-12 (si tant est qu’elle existe) peut atteindre un objectif en mouvement.

On ignore aussi si les concepteurs chinois ont pu développer une ogive à guidage autonome de dimensions réduites comme charge utile du missile balistique, et un système de contrôle pouvant modifier la trajectoire de l’ogive selon les commandes qui arrivent à l’ogive.

Théoriquement, le guidage de l’ogive peut être réalisé à l’aide de satellites de navigation qui permettent à l’ogive de contrôler en permanence sa position et de vérifier sa trajectoire avec les coordonnées de la cible qui, de leur côté, doivent être déterminées par une autre source autonome comme un radar à terre en l’air ou sur mer.

Le problème est que la Chine ne dispose pas de système propre de navigation par satellite et qu’il est évidemment impossible d’utiliser le GPS dans le cas d’un conflit avec les USA, le rival le plus probable, parce qu’actuellement, aucun autre pays au monde ne dispose d’une flotte de porte-avions qui exige des missiles balistiques pour être détruits.

En général, les informations sur la nouvelle arme chinoise soulèvent plus de questions qu’elles n’apportent de réponses. Et si, de toutes manières, elles sont exactes, cela signifie que l’équilibre géopolitique mondial peut subir des changements très sérieux.

Par Ilia Kamnik, RIA Novosti

L’opinion de l’auteur ne reflète pas nécessairement avec celui de RIA Novosti

Source : RIA Novosti (Russie)